Reviews | The Inspector Cluzo - Less is More, il en faut peu pour réussir

Less Is More

par The Inspector Cluzo

sur 10

En juin dernier, The Inspector Cluzo nous balançait un véritable ovni : Less is More. Penchons-nous sur cette bombes’impose toujours plus dans l’univers rock blues.

THE INSPECTOR CLUZO

The Inspector Cluzo, comme son nom ne l’indique pas est un groupe composé de deux français. Issus de Mont de Marsan, ces deux artistes à la tête bien pleine ont boudé la machine infernale de l’agro-alimentaire pour s’établir dans une ferme à vocation durable. Et pendant que les terres reposent et que les bêtes grandissent, quoi de plus normal que de rocker dans le fond de la grange ?

C’est donc sur leur « temps libre » que Laurent et Mathieu affinent depuis des années leur style depuis 2008. Avec Horizon, leur album précédent, The Inspector Cluzo frappait déjà fort alors même que leurs antécédents sont déjà de haut vol.

Malgré des passages iconiques dans des festivals comme Les Vieilles Charrues ou le Hellfest, c’est surtout au pays du rock et au Japon que nos fermiers retrouvent la majorité de leur auditoire. Et pourtant, les français y gagneraient à leur accorder plus d’une oreille.

Toujours plus impliqués dans la cause environnementale, c’est en pensant arrêter devant la démesure de l’industrie musicale et au sens large qu’ils sont rentrés de leur dernière tournée. Mais grâce à l’incroyable Vance Powell, deux ans de travail de texte, d’enregistrement et un an de plus de finition, voici The Inspector Cluzo qui nous livre son dernier album au titre assez éloquent : Less Is More.

PO, PO, PO, POCHETTE !

En guise pochette, une nouvelle création de A. Lacoste. Pour perdurer dans une sobriété qui leur tient à cœur, une photo de maison de ferme entourée de végétation. Dans un environnement vert saturé, déambule en premier plan un chat, évoquant le Catfarm du troisième titre de l’album et leur compagnon de labeur (même si le clip nous montre que le chat de la pochette n’est qu’une doublure). C’est un nouvel animal que Mathieu et Laurent nous présente, après Miguel, le boss présent sur leur label.

TITRES DE L’EP


1. WE WIN TOGETHER, I'M LOSING ALONE
2. AS STUPID AS YOU CAN
3. CATFARM
4. RULES
5. THOREAU
6. THE GREENWASHERS
7. LESS IS MORE
8. MR. FAMELESS
9. WORKERS
10. ALMOST CUT MY HAIR
11. JOURNEY MEN

LESS IS GOOD

Un travail acharné donc qu’est Less is More, on vous le disait plus haut et surtout un enregistrement express made in Nashville (Oh yeah !). Seulement quatre jours d’enregistrement en plein milieu de leur dernière tournée américaine « Horizon » et trois jours de mixage grâce au talentueux et ami Vance Powell.

Plusieurs ambiances dans cet album dont notamment les tubes engagés qu’on avait également pu retrouver dans Horizon.

We Win Together, I’m Losing Alone, un style un peu anarchique au démarrage, un peu mélange punk garage et jazz presque japonais par sa fausse désorganisation avant de se rattraper sur leur bon vieux rock dont ils sont si fiers. Un titre un peu alambiqué qui change d’ambiance chaque seconde. Ce sera la marque de fabrique de l’intégralité de l’album : une sorte de schizophrénie musicale qui pourtant donne un rendu particulièrement réussi.

Laissons nous ensuite bercer par une magnifique intro blues qui ne laissera personne indifférent. De nouveau, rupture du rythme avec une guitare qui devient aussi incisive que les paroles de As Stupid As You Can. Comme le titre laisse à espérer, il s’agit là d’une critique de notre société actuelle qui s’abrutit aux dépens de la biodiversité.

Dans la série, prêtez également l’oreille à The Greenwashers, un peu dans la même trempe que The Armchair Activist en soulevant les aberrations de notre société. Les plateformes d’écoute qui rémunèrent mal les artistes, les voitures électriques, tous ces sujets du quotidien qu’on nous fourre dans le crâne comme si c’était normal. Comme une suite logique, Less is More fait ensuite son entrée. Se retrouve de nouveau une intro qui claque, avec une atmosphère un peu à la Doors.

La finalité de toute cette partie quelque peu pamphlet, ça serait Thoreau. La particularité de ce titre, c’est sa simplicité structurelle instrumentale notamment au niveau de la guitare ce qui lui confère un effet tranquillisant. Sur cette accalmie, The Inspector Cluzo évoque la philosophie de Henri David Thoreau qui a travers Walden ou la Vie dans les bois, une œuvre qu’il réalisa en autarcie totale loin de la société soit disant intelligente.

Et niveau intelligence, il est certain qu’on aurait beaucoup à apprendre du protagoniste de leur chanson suivante : Catfarm. Avec un groove qui vire en reggae complet qui rappelle l’effet tranquille de Thoreau, le titre nous fait palper la détente et la nonchalance de ce chat qui règle en maître sur la ferme. On sent d’ici le félin de ferme increvable prenant son bain de soleil sur une margelle entre deux chasses de nuisibles.

En troisième partie, viennent les titres qui évoquent des parties plus personnelles. Avec tout d’abord, une ôde aux travailleurs : Workers, qui vient saluer le travail appliqué de ceux qui sont littéralement sur le terrain. Et par terrain, on peut également inclure The Inspector Cluzo qui travaille comme on vous le disait plus haut d’arrache-pied dans leur ferme. Plus mélancolique, Rules est un moment un peu exutoire qui en dit gros sur leur désabus surtout quand on sait à tel point l’agriculture est un secteur étranglé par la législation.

Toujours en rejet de cette société au sens large, se place Mr Fameless. Laurent le martèle à chaque concert mais les deux gascons ont bien failli s’arrêter il y a peu, fatigués de l’industrie musicale. Et quoi de mieux donc que de l’exprimer dans une de leur chanson ? Voici qui est chose faite. Leur cheval de bataille, rocker et farmer : dénoncer ce qui leur tient à cœur en faisant fi de la célébrité, fouler les petites salles mondiales et leur sol agricole sans tenir compte de l’hydre mondialiste.

De nouveau très calme, l’autobiographique Journey Men évoque des tranches de leur dernière tournée à travers le monde. Le dernier titre, Almost Cut My Hair a beau ne pas être signé de leur main mais de celle du fantastique quatuor Crosby, Stills, Nash & Young, il n’y avait pas mieux pour traduire leur fatigue générale et l’envie de tout quitter musicalement parlant.

Lourdement influencé par leur dernière tournée à travers les campagnes du monde ces deux dernières années, The Inspector Cluzo démonte la baraque avec ce nouvel album Less is More. Par la puissance de ses textes, de leurs capacités techniques ou ne serait-ce que par leur musique, on se laisse embarquer par leur conviction et les tripes qu’ils mettent dans ce nouvel opus. Avec encore une déclaration à l’Humanité et à son emballement infernal, Laurent et Mathieu se placent en bardes répandant la bonne parole. Mais tout comme les Cowboys Fringants le faisaient, ils montrent ouvertement que la chose n’est pas facile et que nous restons des humains faillibles.

Musicalement, en ressort effectivement ce côté plus rock de l’album annoncé qui n’est pas sans rappeler leur prestation live, souvent plus pêchue et authentique que l’enregistrement. Comme aime à le rappeler Laurent, The Inspector Cluzo en plus d’être un groupe de musiciens extrêmement talentueux, c’est du spectacle vivant. Quoi de mieux donc de les savourer en live et de se faire prendre aux tripes par leur magie musicale !

FAR( WEST)M TOUR

Fini la tournée étasunienne dans notamment des villes comme Fargo ! The Inspector Cluzo s’accorde un petit break avant la reprise européenne début octobre. De quoi potasser toutes ces petites dates pour savourer un de leurs lives.