Nous avons eu la chance de nous entretenir longuement avec WarEnd, jeune rappeur toulousain très prometteur dont le succès ne fait que croître ! 


Hugo : Bonjour !

WarEnd : Salut ! Enchanté !

Hugo : Merci d’accepter de nous donner cet interview.

WarEnd : Merci de nous donner la force.

Hugo : Bah écoute, on est là. On vient soutenir la scène locale et pour des personnes qu’on a vu, pour qui on a fait des photos pour des concerts, c’est toujours cool d’avoir un suivi.

WarEnd : Ça fait plaisir.

Hugo : Est-ce qu’on attaque direct avec tes actus du moment ou est-ce que tu veux faire un truc plus en douceur.

WarEnd : Ecoute, on peut. Ca changera des autres interviews où on parle de mon passé avant de parler du présent. On peut parler du passé mais je crois qu’il est déjà assez écrit.

Hugo : T’es sur une période assez charnière où il y a des actus dans tous les sens, donc ça serait bête de ne pas en parler.

WarEnd : J’avoue qu’il y a pas mal de choses à gérer. Déjà, il y a le 27, ma première date solo au Connexion ce qui est quand même fou à mon stade. De toute façon, je ne réalise pas du tout. J’appréhende encore. Des fois, je me demande si les gens vont kiffer mais en même temps, ils sont là pour moi. Ce paradoxe est assez bizarre dans ma tête. Pour foutre un petit coup de promo aussi, j’ai décidé de sortir un son qui s’appelle Naissance donc qui porte le nom du spectacle. Et je sors le 20, vendredi à minuit. Il sera disponible sur toutes les plateformes. Ce sera un prélude du concert. Donc sur ça, je suis assez content. Ce n’était pas prévu, je l’ai fait là, dimanche. De base, je voulais sortir un single zéro de mon EP qui sort le 3 février donc en gros à partir de février. Donc beaucoup d’actu jusqu’au 3 février surtout qu’il y aura aussi les clips. Et de base, je voulais mettre un single de ce projet  et le mettre avant la sortie pour teaser l’EP. Et au final, je me suis dit que je ne voulais pas le teaser de cette façon-là parce que déjà, il y a « Muse » qui est déjà dans les chaises nwar. Même s’ils ont écouté que les premières paroles, ils ont quand même écouté. Je voulais donner un peu de chaise nwar mais pas trop non plus, mais je sais pas pourquoi, samedi soir, c’est parti en cacahuète. Je me suis pas contrôlé et c’est sorti tout seul. Et j’ai fait ce son que j’ai programmé pour vendredi. Donc c’est cool, ça rajoute de l’actu, ça renforce la promo du spectacle. Là, cette semaine, on a un jeu-concours où on va coller des affiche en ville vendredi soir. Et celui qui se prendra en photo le lendemain gagnera deux places. Avec un autre média rap que j’aime beaucoup, TPZ, lui aussi il est là depuis le début, depuis le Connexion aussi, Youv Dee. Il avait entendu parler de moi avant mais on s’est plug à ce concert-là . J’aime beaucoup ce type et le contenu qu’il propose. Pourquoi pas ne pas faire un jeu avec lui pour le concert. C’est déjà pas mal.

Hugo : C’est clair, ça fait déjà un gros step de se retrouver en haut de l’affiche.

WarEnd : Bah c’est différent des premières parties, où je vais en répèt’, je répète mon show, les gens ne sont pas là pour moi, c’est quitte ou double. Y a une certaine pression mais si les gens ne valident pas, ça ne change pas mon taff. Je continue mon show et je sors et ça aura été une expérience. Là, il y a plus d’enjeu. C’est pas que je peux décevoir, vu que je ne dois rien à personne non plus mais je suis très perfectionniste. Je ne veux pas de couac sur des choses importantes. Un exemple, le buzz booster où j’ai gagné en Occitanie, à la finale de Nimes en plein covid, je suis parti à Lille pour la finale nationale. J’avais prévu 30 min de show avec appui écran avec tout une vidéo qui était calée. C’était un truc très artistique avec juste un écran noir où de temps en temps John qui passait derrière. Et gros couac sur cette pièce maîtresse, parce que c’était une toile comme pour un vidéoprojecteur et avec les lumières, on ne voyait rien. Et ça, j’y pense beaucoup. On a pas prévu un grand écran, on a minimisé les risques mais on sait jamais. Même en première partie, on a toujours eu des galères. Ca rajoute ce côté épicé au truc.

Hugo : Logique que ça te fasse stresser. Tu bosses sur quelque chose, t’as envie que ça se passe bien.

WarEnd : Ouais, c’est ça. Quand je vois les autres artistes passer avec leur premier concert, je vois notamment sur tiktok, sans juger, je donnerais pas de blase, j’en vois passer, c’est la mala assurée, ça met les plus gros bangers, ça saute dans tous les sens. Et après, en général, t’as plein de gars qui viennent sur scène, des gars de leur équipe ou de la cité, tu vas avoir plein de featuring les invités tout ça, les gens ils sont rassasiés parce qu’ils en ont eu pour leur argent et c’est fini. Je me prends un peu plus la tête et on a monté une pièce de théâtre. Vu que tout doit être bien calé, il y a beaucoup de choses à retenir. Mais c’est bien, ça stimule.

Hugo : Puis en plus, ce que je trouve de base dans ce que tu fais et que tu viens de dire, c’est que y a un vrai côté, profondeur artistique du projet. On sent que c’est plus réfléchi et c’est tout à ton honneur même si pour toi, c’est vachement plus stressant.

WarEnd : Depuis que je suis tout petit, j’ai toujours eu envie de faire les choses différemment des autres. Et naturellement dans ma façon de penser, ce qui se retrouve dans l’artistique. Ce serait mentir que de dire que j’ai cherché pendant des années des solutions pour être différent. Via John et le secret de ma carrière, tout s’est fait tout seul. Chaque fois que j’ai voulu arrêter la musique, il y a eu un truc qui m’a fait changer d’avis. Ce n’était pas des paroles de potes qui tentaient de me raisonner. C’était vraiment des faits. J’étais devant le fait accompli. Il y a une année à Paris, j’avais arrêté le son pendant 3 ans. J’étais dans une période où je ne faisais que danser et mes potes pour mon anniversaire, m’ont offert un enregistrement au studio Bomayé Musik à Paname. A l’époque, Naza et Keblack étaient en pleine ascension, c’était fou. Et j’allais leur annoncer que j’allais arrêter et j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. J’en avais parlé à personne de vouloir arrêter, j’en étais même rendu à vouloir devenir Freestyler professionnel, à m’investir dans la danse. Et au final, il y a toujours eu des étapes qui m’ont mis des gifles pour pas que j’abandonne.

Hugo : C’est trop cool ! Après, du coup, je ne sais pas comment  ça s’est goupillé pour toi mais pour les artistes émergents, le covid n’a pas trop aidé. Il y a eu une chute assez violente de plein d’artistes qui était motivé mais qui ont tout plaquer parce que c’était compliqué. Du coup, voir que passé cette  période là, y a encore moyen de continuer de rebondir et même d’évoluer avec ta date à toi et ton projet, c’est un peu démonstrateur de cette volonté de pas lâcher, de toujours aller de l’avant.

WarEnd : De ouf, c’est gratifiant. Je me rends compte aussi que tous les sacrifices que j’ai pu faire ces derniers temps ou sur toutes ces dernières années, ça commence à payer petit à petit. Ca, c’est une peur de se dire que tu fais des sacrifices et que tu peux avoir perdu du temps ou d’avoir dit non à quelqu’un parce que t’es trop occupé. Des fois, je vais refuser des sorties parce que je suis chez moi, dans ma chambre et que je suis dans l’inspiration du moment. Je me prive de moments où je pourrais kiffer avec mes potes, me faire des souvenirs ou même bouger. Les anniversaires de mes petits frères, c’était le pire. Je culpabilisais dans ma tête alors que j’étais en train de créer un son . J’ai pas de thune, ça avance pas, on galère à programmer des clips. J’ai des amis qui m’aident et que je ne peux même pas payer. Ce sont toutes ces questions là qui m’ont souvent remis sur la question de l’abandon. Ce qui m’a aussi maintenu dans une hygiène de vie correcte, c’est le travail. Ca m’a permis de manger et de subvenir à mes besoins tout au long de l’année. J’avais des périodes compliquées comme tout le monde mais oui c’est gratifiant à mort.

Hugo : Ce qui me fait marrer, c’est que dans tout ce que tu dis, j’entends ce côté hyper réfléchi et pourtant tu as commencé l’interview en me disant que tu avais composé un son et publié d’un coup comme ça en one shot. C’est hyper contradictoire. Et pourtant c’est assez marrant parce qu’on a l’impression quand on entend que tu as l’air de réfléchir et tu as ces petits moments de spontanéité où tu dis « vas-y, je le sors ! ».

WarEnd : L’artistique, c’est vraiment le côté où… Dans ma vie perso, je réfléchis beaucoup mais la musique c’est le seul endroit où je fais ce que je veux. Liberté d’expression max, lâcher prise max. Faut que j’essaie de tout faire au max, je me pose pas de questions. Si j’ai une idée, la première est souvent la bonne. Maintenant j’ai une équipe mais de toute façon, la décision finale, cela reste toujours moi. Mais j’ai du monde si j’ai des doutes. Mais dans ma vie perso, je vais souvent être à réfléchir sur tout. Pas à vouloir tout contrôler parce que je lâche prise aussi et c’est ce qui fait que je suis aussi détendu. Mais je réfléchis constamment. Mais la musique me permet de créer l’équilibre. Avoir le côté où je peux me lâcher et être un peu associable comme je suis des fois. Il faut que je me prépare un peu si je sais qu’il  y a beaucoup de monde. Mais la musique rend ça gérable quand je sais que quelque chose est beaucoup trop fort. Y en a, c’est le sport. Moi je le cumule avec la musique, la lecture, la nature aussi. J’aime bien aussi aller me promener tout seul. Où là tu vois, maintenant que je connais cette adresse, je peux revenir avec mon ordi ou soit lire un livre. Ce sont des moments qui me font du bien.

Hugo : C’est bien pour se poser aussi. Il y a une question que je voulais te poser. Ici, à Toulouse, les artistes ont tous ce discours qui est un peu chauvin mais peut-être vrai de comme quoi la ville offre une scène assez alternative. Tout est un peu en mouvement avec la possibilité d’évoluer. Moi je n’ai jamais vécu ailleurs et je bosse dedans donc je ne connais que ça mais peut-être que toi qui parlait de Paris, as-tu cette impression que le fait d’avoir été à Toulouse, ne serait-ce que via les rencontres et la scène en général, tu l’as vu aussi comme un avantage ou as-tu l’impression que c’est une ville comme une autre ?

WarEnd : Alors, c’est une très bonne question. Parce qu’en fait, je ne suis pas de Toulouse, je suis né à Paris dans le 94, où j’y ai vécu jusqu’à mes 12 ans. Après j’ai été à Saint-Laurent de la Salanque où j’y ai été au collège et lycée. Un an à Toulouse où j’ai découvert la ville pour la fac. C’est là où j’ai découvert la musique. J’ai été ici parce que mon père habite ici. Et que Saint-Laurent de la Salanque ou Perpignan, ça peut paraître péjoratif mais c’est dur d’évoluer là-bas. Tant que tu es pas dans leur mentalité, après tout ce sont les catalans. Quand tu vois qu’ils veulent leur indépendance, bon courage pour leur faire changer d’avis. Je suis arrivé dans un village où j’étais le seul métisse, donc autant te dire que pas facile la vie. Et en plus artistiquement et l’ouverture d’esprit, c’est dur. A l’époque au collège, j’étais le seul à écouter du Sexion d’Assaut. Après, les gens ont commencé quand ils ont commencé à sortir des singles plus commerciaux. C’est bien parce que j’ai eu de belles rencontres mais je n’y retournerais pas pour y vivre. Trop dur. Où alors faut être haut placé et connaître du monde pour être respecté. Sinon le regard des gens… Moi, je m’en fous, mais j’ai des gens qui reviennent me follow parce qu’ils voient que j’ai plus mon acné et mes baggies. Donc sur Perpignan, c’est un peu ce que tu disais, c’est dur d’évoluer sur la scène. Paris, tout le monde monte à Paris pour évoluer sur la scène. Toulouse… Je n’ai pas essayé de voir Toulouse dans cette vision là. Je l’ai prise comme elle était. J’ai eu les rencontres qui ont fait que j’ai évolué avec la scène toulousaine. Après, mon objectif principal, c’est surtout de montrer aux gens qu’on est pas obligés d’aller à Paris pour faire quelque chose. J’en ai marre d’entendre les gens dire que dans le Sud, il n’y a que Marseille. Bordeaux, c’est dur et pourtant, ils pourraient faire des choses. Mais il y a tellement d’étudiants que ça fait tourner tous les 2-3 ans. Toulouse, il y a des gens qui restent pour y vivre. Et ils y a les infrastructures pour étudier pendant des années. Bordeaux aussi mais ça dépend des branches. Paris, forcément, il y a tout donc tout le monde y reste. J’ai vu beaucoup d’artistes toulousains qui dès qu’ils avaient de l’audience, ils partent à Paris. Ici, je trouve que ça s’entraide beaucoup. Je pense qu’il faudrait prendre la ville comme tu dis, en s’appuyant sans trop s’appuyer parce qu’il y a des bons ou les mauvais côtés. Je ne connais pas les mauvais côtés de Toulouse, je suis bien entouré donc ça m’a permis d’éviter les gens qui ne sont pas nécessaires. J’ai eu mon expérience label qui a été une mauvaise expérience mais maintenant je sais à quoi m’en tenir. Je peux donner le nom, c’est Maltrack Music. J’ai aucun scrupule à dire que j’ai une mauvaise expérience avec lui. D’ailleurs pour tous les artistes toulousains qui veulent percer, n’allez pas chez lui. C’est tout ce que je dirai. J’aime Toulouse pour sa mentalité, pour son ouverture d’esprit même si c’est pas foufou. Ca reste à 90% pas mal. Les 10% ce sont les puristes qui écoutent du Jacques Brel ou du Claude Nougaro. Mais on part dans l’extrême. Tout le monde écoute de tout. Je l’ai vu avec Bigflo et Oli, il y a énormément de parents qui viennent me voir pour que dire que le rap c’était pas leur délire, que Bigflo et Oli c’est pour leur enfant enfin sauf le dernier album. Mais que le combo Bigflo et Oli et moi c’était parfait. Et je trouve ça cool d’entendre ça de parents. Donc non pas  déçu, j’ai Toulouse dans le cœur. C’est pour ça que j’ai fait ce son là « Lumière sur ma ville » et réuni tous les acteurs dans le clip de Toulouse. Bigflo et Oli, je ne les compte pas dans ça car je les connais depuis peu même si artistiquement je les connais depuis longtemps. Ce sont les acteurs principaux de cette ville, ils ont mis le drapeau sur la carte, le drapeau de l’Occitanie sur la carte et ça c’est beau. Parce que très peu revendique Toulouse, dans la variété, un peu plus mais pas dans le rap. Je trouve ça dommage. La culture urbaine est pas assez développé et je trouve ça dommage mais c’est dû à l’histoire. Paris, c’est un peu là où tout est né. Donc c’est plus facile à eux d’organiser de gros évènements, de faire venir de grands artistes. C’est la capitale. Et un rappeur qui a un CV qui vient de Paris, quand il vient à Toulouse, tout le monde est impressionné alors que ça veut strictement rien dire. Ici, il y a des talents qui devraient croire en la ville, croire en l’Occitanie, s’appuyer sur des tremplins comme le Buzz Booster, essayer les inouïs. Y en a pleins d’autres, les Pernod Ricard, ce sont de bons tremplins pour donner de la visibilité qui sont en plus locaux. On a des acteurs comme Bleu Citron qui sont dans le développement et il faut s’appuyer dessus. Même s’ils ne te soutiennent pas sur le long terme, ils te donnent des conseils, tu les prends, tu les prends pas, c’est bénéfique. Donc oui, c’était un peu long comme réponse.

Hugo : Non mais c’était intéressant. Parce que tu dis qu’ici, il y a le côté entraide. Je trouve qu’à Toulouse, il y a beaucoup le côté Do It Yourself, qui est resté. Côté artiste mais pas que. Tu vois, je suis dans les orgas de concerts et les prod et quand tu vois ça, c’est encore en grande majorité des milieux associatifs, avec des gens qui font ça par passion. Qui bossent sans compter leurs heures pour pouvoir organiser ce qu’ils veulent. Après c’est peut être parce que ce n’est pas industrialisé mais je trouve qu’à Paris, c’est souvent l’entreprise qui veut faire son bénéf. Et donc tu vas sortir un album ou faire un concert parce que ça va marcher. Y a moins ça ici, si ça se trouve c’est dans toutes les plus petites villes, je ne dis pas que c’est qu’à Toulouse. Mais il y a beaucoup plus de soutien et d’essayer de travailler ensemble.

WarEnd : Je pense que de ce que tu viens de dire, ce qui fait la différence entre Paris et les autres villes en France, c’est que ces derniers n’ont pas forcément les moyens de faire ce que Paris fait, du coup il y a de l’entraide. A Toulouse, Bajo El Mar sont comme ça. Ils vont pas compter l’argent qu’ils perdent et ils vont aller tout droit pour obtenir ce qu’ils veulent. Y a un rappeur  qui s’appelle Samir Flynn qui est beaucoup dans les assos pour essayer de faire bouger tout ça. Il se joint à énormément d’artistes. Ici, j’ai la sensation même si j’ai entendu des choses, que les moyens sont pas assez développés pour ça. Un truc tout con, Bigflo et Oli ont ramené un festival à Toulouse, ça a été un carton, j’ai vécu les deux plus beaux jours de ma vie. Déjà c’était mon premier festival, et ils avaient les moyens, ils l’ont fait. La preuve, ça marche. Regarde si on arrive à développer comme à Paris, un exemple. Adidas et Instagram vont développer un évènement, ils vont ramener toutes les grosses têtes d’affiche et faire un concert avec un match de basket et des danses un peu comme le Quai 54 ou le tournoi de foot sur le toit de Montparnasse. Pourquoi on fait pas des trucs comme ça ? On fait du rugby sur l’eau. C’est bien parce que c’est local. Faut garder ces évènements là, les nocturnes de Victor Hugo parce que c’est Toulouse. Mais faut rajouter pour tout le monde. Je pense pas qu’il y ait assez pour ceux qui aiment le hiphop ici. Que ce soit commercial ou pas. Commercial ils sont servis car il y a les artistes qui viennent mais par contre créer de gros évènements hiphop, faire débloquer la scène émergente, débloquer des moyens pour faire ci ou autres. Y a un truc que j’aimerais ici, c’est une sorte de mini festival à la Place Arnaud Bernard. Je travaille à Carrefour City Arnaud B, je suis chef d’équipe là-bas. Et mon patron, ça fait des années qu’il essaie de faire bouger la place. Parce qu’elle est à côté de la Basilique Saint-Sernin qui est magnifique et qui n’est pas un quartier populaire. Et la place n’a rien à voir au milieu de tout cela. Les vols, même l’hygiène, ça doit être dur pour les mecs qui nettoient. Faire bouger ça, c’est une question d’autorisation de la Mairie. De faire bouger certains commerces qui permettraient de faire des choses. La politique, j’y connais rien et j’en parlerais jamais parce que c’est une source de conflits. Je sais qu’on est bien entourés avec le maire et l’adjoint mais faudrait rajouter des évènements culturels à Toulouse. Des fois, les petites villes comme Albi se bougent plus le cul. Ne serait-ce qu’en danse. J’y suis allé pour des concerts sauvages. C’est une question d’envie et de priorité.

Hugo : Je suis d’accord avec toi . C’est important de ne pas négliger ceux qui se bougent.

WarEnd : Oui, y en a qui se bougent. Et au bout d’un moment, ça va payer. C’est le message que je véhicule. J’ai du sang parisien, je peux pas le nier. Quand je suis à Paris, je le vois dans ma  façon d’agir à Toulouse, je suis beaucoup plus speed, j’ai du mal à me promener même si j’adore ça. J’ai toujours un objectif. J’ai un avantage sur pleins de choses. Mais vous avez des avantages que je ne vois pas et que j’apprends au fur et-à-mesure. Mais j’ai Toulouse dans le cœur depuis 5 ans et je vais continuer de le véhiculer. Il fait beau, c’est bien.

Hugo : Et tu parlais de vouloir véhiculer ce message. Question reloue : c’est quoi la suite ?

WarEnd : Déjà, y a le retour à la réalité car en dehors des clips qui vont sortir, on va regarder comment ça bouge sur l’EP. Y a quelques projets annexes cools qui arrivent. Je travaille avec Tealer, Chevignon et Asics avec qui on bosse une collab ‘. Des marques qui poussent des artistes émergents. Ils demandent rien sauf peut-être quelques stories, des shootings même si c’est pas dit officiellement. Je vais reprendre le travail entre le 5 et le 7 février. J’avais arrêté parce que je me suis fracturé la main. Donc ça va être la petite pause où y aura des concerts. Je sais que mon manager cherche des dates pour avant l’été et beaucoup après l’été. Donc petite pause tranquille et puis j’aime bien cultiver la rareté. Je fais pas exprès mais j’adore ça. Les réseaux, c’est quelque chose que je déteste.

Hugo : Oui après y a des artistes qui vont toutes les semaines dans un bar différent. Tu te dis à un moment, ils vont souler leur public.

WarEnd : Puis c’est bien d’avoir la niack mais faut penser à contrôler sa dalle. De pas aller chercher tout et n’importe quoi et c’est le problème des artistes émergents. Pas tout aller chercher même si ça implique de la thune. Là, avec le nom que je me fais, je le vois comme ça. Je suis toujours un rappeur de chambre et en plus j’aurais du mal à penser autrement. Faut que je l’accepte, je commence à devenir quelqu’un… Fin bref, c’est une aparté. J’ai commencé à le voir avec des marques qui te proposent des collab’ et qui te mettent des sommes. Quand tu commences, tu vois l’argent qui arrive, tu te dis « vas-y ». Et ça peut te griller. Moins si tu vas faire des Open Mics et des petits bars dans tous les sens. Tu gagnes de l’expérience. Mais si c’est pas dans ce domaine là, il ne faut pas tout accepter. Après ça dépend de ton objectif après, si ton but c’est de finir sur toutes les interviews de France, de ramasser un max d’argent sur peu de temps, bah go. Je ne juge pas mais je le ferais pas. Je pense quand  même qu’il faut contrôler sa dalle parce que ça permet d’aller sur le long terme.

Hugo : Puis tu perds en crédibilité. Si tu es très talentueux, ça marchera quand même. Mais s’il y a une hype pour un son, et qu’après tout ce que tu sors ne marche pas mais que tu joues de ta notoriété, ça va jamais durer.

WarEnd : Tu as tout résumé : sortir un son, tu vois ça marche pas. Tu as besoin d’argent, tu reçois un mail. Mais tu perds en crédibilité et tu t’éloignes de tout. Pour la suite. Du coup, c’est vrai que je n’ai pas répondu à cette question. J’ai un prochain projet. Le 21, le 27 janvier et le 3 février. Et j’ai un autre projet qui sortira en début d’été en mai-juin. Je ne sais pas la date mais de toute façon j’ai quasiment 5 ans d’avance sur mes projets. En terme de direction artistique, d’idées, de nom, d’idée de pochette, j’ai pas forcément tous les sons mais j’ai 5 ans d’avance. Y a beaucoup de choses qui changent comme par exemple « Mutation », le 3 février, c’était pas prévu. Je voulais sortir un EP juste après « Specimen » qui s’appelle « Specimen Rare ». C’est une sorte de réédition, enfin plus un 2e volet. « Specimen », tu as le produit et « Specimen rare », la notice d’utilisation du premier. Le temps est passé et je me suis dit que c’était beaucoup trop tard mais je voulais sortir un EP. Donc j’ai fait « Les chaises nwar » qui est sorti comme c’était. J’avais besoin d’écrire. Au moins, dans ma direction artistique, j’ai besoin de faire des EP annexes pour me vider afin de me concentrer sur des choses plus cérébrales. Je l’ai géré autrement et j’en ai fait une mixtape avec « Les chaises nwar » et ça a complètement vrillé avec le mood du moment en « Mutation », « Mercure ». J’ai pris du recul sur le projet et j’en suis venu à la conclusion que « Naissance » et « Mutation » se complètent. Et là en 2023, on repart sur une ouverture des portes. Ca paraît complexe dit comme ça mais ouverture des portes.

Hugo : Quand je t’écoute parler, j’ai l’impression que chaque son pour toi à une signification. Ce n’est pas forcément la démarche de « tu veux sortir un EP, tu écris 5 titres, y en a 2 qui te plaisent et les autres qui remplissent ». Du coup, je me demande si tu galères pas à faire des setlists pour tes concerts vu que tous tes sons ont l’air d’avoir une importance et une histoire. Ou alors tu les joues tous et ça dure 4 heures (rires).

WarEnd : Déjà 1h30, je répète et je trouve ça long.

Hugo : Oui c’est long et le jour J, ça va passer tellement vite

WarEnd : De ouf, j’ai l’habitude de faire 30min, je fais ça à 3h du mat’ et je me couche à 4h grand max. J’ai voulu faire la même hier soir et je me suis dit « attends, si je commence maintenant… ». Donc non, j’ai pris que les sons que je voulais taffer. Pour les shows, je suis pas tout seul, j’ai mon directeur artistique qui est comme mon grand frère, je le connais depuis 10 ans. Il sait ce que j’ai en tête et il est plus là pour la direction artistique scénique, l’aspect visuel. La gestuelle et la choré, je gère mais dès qu’il voit des trucs qui marquent, il me dit de les refaire. Quand on s’écoute les sons, ce qu’on adore c’est créer un storytelling. Et avec ce que j’ai vécu depuis que j’ai commencé la musique, il y a toujours une ligne directrice inconsciente. Parce que j’avais  fait des sons de manière inconsciente mais y avait un thème récurrent. Et on les assemble comme ça. Des fois, c’est drôle, comme le Tetris, on prend des thèmes et des couleurs et on les assemble et ça valide. Pour le show, on a fait plusieurs pavés. Y en a un où je me présente, qui implique légèrement John et l’énergie positive, et après tu descends vers le dark par des pavés de ma vie. Je vais pas trop en dire non plus. Dans ses pavés, on s’est dit, qu’est-ce qu’on peut mettre ? Là, on en a mis 5, puis 8, puis 6. Après, on dégrossit et on fait les répètes et après je vois. Si ce son a de l’impact, on peut être obligé de faire une pause avant de repartir. C’est le plus compliqué. Le choix des sons, j’ai beaucoup de matières donc de choix mais la prise de tête, c’est le lien et l’enchainement. Des fois un mot enchaine sur l’autre. C’est là, le compliqué.

Hugo : En fait, tu fais plein de choses qui ne sont pas forcément toutes liées et au moment de les lier, ça crée le show.

WarEnd : Ce qui est cool, c’est aussi si deux pavés ne s’assemblent pas, soit on peut modifier le pavé, soit une transition pour le lier. Et c’est intéressant parce que ça donne tout son sens au show. Nous on sera fier d’avoir pensé à ce détail là. Avec les artistes que je suis depuis que j’ai commencé à écouter de la musique, je me concentre sur les détails. Pareil dans les films comme les Avengers, y a plein de petits détails dont je suis fan, les easter eggs. Au début les gens ne comprennent pas toujours et soit ils critiquent soit ils disent rien parce qu’ils ne comprennent pas. Mais il y a toujours des gens qui vont se pencher dessus et ouvrir les yeux des autres. Et c’est là que ton travail est récompensé. Ton travail devient solide. Et pour le show du 27, où je referais pas ce show ailleurs, je veux que ce soit une expérience unique avec pleins de détails comme ça plus tard, ils se diront « ah ouais ! ». On s’amuse beaucoup même si c’est épuisant. C’est toujours mieux que d’aligner sans réfléchir, d’apprendre par cœur. Moi j’aime pas la routine. Quand je vais au McDo prendre des nuggets, j’adore prendre au moins deux ou trois sauces. Je suis tout le temps en train de varier les plaisirs. Hier matin, je suis tombé sur des recettes de cuisine, des ramens, et le soir, je vais faire des courses, je me suis fait mes ramens. Ce matin, j’étais déjà en train de me dire qu’est ce que je vais m’acheter ce soir, mexicain ? Alors qu’à la base je devais faire des ramens pendant toute la semaine tu vois ? J’aime varier les goûts et les plaisirs. Y en a qui aime la routine parce que c’est sécuritaire. Je juge pas le train de vie de travail, belle voiture, belle maison, famille, enfants rebelles ou carrés et les parents soient qui vont finir frustrés ou heureux dans cette routine. Mais c’est pas dans mon délire de pas prendre de risques. C’est pas excitant. Après y a l’extrême, tout chambouler. Mais y a des mini prises de risques qui n’impactent pas ta vie. La prise de risque, c’est d’essayer de faire un jeu vidéo en 24h et si t’y arrive pas, t’as juste perdu du temps. Mais t’as eu de l’expérience. C’est comme ça qu’il faut le voir. Mais il faut bousculer la scène. Sur scène, tu peux pas faire ce que tu fais en studio.

Hugo : C’est bien d’avoir une version live différente de l’album. Qu’on te copie-colle pas ça en concert quoi. C’est toujours intéressant.

WarEnd : Faut les surprendre, il faut les surprendre. Après ça va peut-être être différent le 27 mais j’ai l’impression que la donne s’inverse un peu. Avant, c’était beaucoup de spectacles avec beaucoup de performance sur scène. Et maintenant, ils paient, ils viennent, l’artiste chante un peu mais c’est les gens qui paient pour chanter. Ils peuvent tout autant continuer de chanter pour donner la force sur scène mais il faut que l’artiste fasse le taff. Après moi j’ai énormément de chance sur scène parce que j’ai eu tôt cette fibre artistique. J’ai réussi à me détacher du regard des gens assez vite et à maitriser la façon de gérer mes émotions face à tout ça, ça m’a aidé. J’ai aucun scrupule à faire un clip dans la rue Saint-Rome. Y a des coachs scéniques qui sont là pour ça mais moi je peux m’en passer. J’ai la chance d’avoir fait un peu de télé notamment danser pour Maitre Gims aux Victoires de la Musique en 2017 grâce à mon directeur artistique, chorégraphe Guillaume Lorentz. Et grâce à mon entourage qui m’a aidé. Mais même si t’es introverti, il y a des coachs scéniques qui sont très très bons. Ils te font pas faire ce que tu veux pas. Après si toutes les artistes étaient des perfomers sur scène, ça serait incroyable. Si tout le rap était un peu rock. Les gens ne survivraient pas, il y aurait des crises cardiaques, ça serait fou.

Hugo : J’aime cette phrase « Si le rap était un peu plus rock ». C’est vrai qu’on a tendance à se cacher derrière un style alors qu’en live, faut juste tout péter. Faut être à fond, tout casser, sortir en transpirant, que le public s’en rappelle.

WarEnd : C’est pas en studio que tu vas faire ça. En studio, tu fais ce que tu veux. Tu vois, la voix grave quand je suis en studio, et bien sur scène, mis à part quand j’aurais les modules ou un ingé son, je suis obligé de m’adapter. Et comme je n’ai pas de backers en plus de ça, forcément ça double le changement scénique. Je suis obligé de proposer autre chose.

Hugo : J’ai une dernière question à te poser : Qui voudrais-tu que l’on interviewe après toi ? L’idée, c’est de créer une chaîne. Cela peut être qui tu veux tant que c’est possible, genre pas une personne décédée (rire).

WarEnd : Je fais en donner 3 et vous ferez le choix : Y a Lerem qui est un très bon ami et qui est incroyable et qui a une détermination hors norme. De toute façon les trois sont comme ça et n’ont besoin de personne pour être qui ils sont. Lerem, il était basketteur pro avant et il a tout plaqué pour plusieurs raisons, il s’est lancé dans le son. Il a réussi à atteindre son niveau aujourd’hui en 1 an et demi. Il a fait des tremplins, des scènes, il a beaucoup évolué. Fallen Clayt qui sont aussi des amis. C’est un duo, ce sont deux bons humains. Pleins de détermination. Fallen je le connais bien, Clayt travaille pour le groupe Opium, Poney Club, en tant que chef de bar. Et en parallèle, il est associé à Tealer Toulouse. J’aime beaucoup ce qu’il fait, on bosse un petit feat. Le troisième c’est Wisley, le nom te dit peut-être quelque chose. Au début il s’appelait Lewis et maintenant c’est devenu Wisley. Il a fait une petite pause artistique. Je le suis depuis un moment, il m’a donné de la force et des conseils au tout début. Comme s’il me connaissait depuis des années. Des conseils que j’avais eu de mon équipe et j’ai trouvé ça extraordinaire parce que ça veut dire qu’il m’a bien cerné. La détermination et un très grand cœur. Si vous voulez interviewer une de ces 3 personnes, ils ont prouvé leur détermination et se sont battus ces dernières années pour percer. Et je trouve ça très cool.

Hugo : C’est noté, merci ! Très cool cette interview, c’était fluide. C’est ce qu’on essaie de faire avec les gens et ce qui fait qu’on discute. Ca permet aussi de faire parler et de connaître les artistes.

WarEnd : J’aime beaucoup ce format d’interview, ça tue !

 


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