Live reports | Heilung à Lyon, rituel sous les arches de la Halle Tony Garnier

Heilung à Lyon, rituel sous les arches de la Halle Tony Garnier

C’était pour les Lyonnais une dernière manière de contempler l’art particulier d’Heilung avant que le groupe ne prenne une pause de durée indéterminée mais néanmoins bien méritée.

Heilung a choisi la Halle Tony Garnier pour cette soirée du 25 avril 2025, une grande salle certes, mais dont le charme de l’armature métallique a sublimé la magie de leur performance.

Retour sur cette soirée, rendue possible par Les Derniers Couchés, que je remercie chaleureusement pour la confiance qu’ils nous accordent depuis plusieurs années déjà, et l’invitation de ce soir.

Eivør en guise de préambule

La talentueuse Féroïenne Eivør Pálsdóttir et ses musiciens étaient missionnés d’introduire la soirée face à 2500 spectateurs venus dès l’ouverture, étant conscients, je pense, du talent musical de l’artiste. Eivør nous présente Enn, sa dernière création, au travers de quatre morceaux extraits de ce cru de 2024 et qui, lorsqu’ils résonnent dans tous les coins de la Halle, envoûtent le public qui ne peut décrocher son regard de l’artiste.

Passant de la danse à la guitare, puis au tambour, Eivør exprime son art sans faillir, accompagnée de son talentueux trio d’instrumentistes, en alternant entre les morceaux de l’album susnommé et des titres plus anciens. Un petit détour vers une des chansons composées pour la BO de The Last Kingdom viendra compléter une setlist riche en couleurs et performée avec brio.

Le public est prêt, place à Heilung !

Setlist :

Jarðartrá
Hugsi bert um teg
Salt
Í Tokuni
Hymn 49
Trøllabundin
Enn
Upp Úr Øskuni
Falling Free

Heilung : mise en scène de haute voltige

Le silence règne dans la Halle alors que les lumières s’éteignent. Le public lyonnais est (pour une fois) respectueux de ce moment de suspens pendant lequel Heilung investit la scène avec une mise en scène maîtrisée, à grand renfort d’encens, diffusé consciencieusement à chaque recoin de la scène, et projeté à l’aide de rameaux sur nous, public.

Alors entre l’ensemble des musiciens, qui se placent en cercle pour exécuter le rituel introductif entre eux, comme si nous n’étions pas là. Puis, après s’être tournés vers nous, c’est parti. Les tambours et instruments primitifs se font entendre, ponctués de cris et de chants diphoniques, criés, bestiaux ou primaux.

La mise en abyme est immédiate, et on le public semble investi d’une forme de transe entretenue par les percussions répétitives qui font vibrer nos corps. Partout des danses, sur scène et dans le public, alors que les guerriers investissent la scène.

Pas de narration définie, mais de nombreux sens

Heilung ne développe pas une histoire précise dans ce concert, mais les différents tableaux suggèrent une mise en scène de diverses situations dont le sens fait toujours référence à la communion avec la nature, le rapport aux ancêtres, la guérison, dans une mise en scène primale et dont l’intensité va crescendo jusqu’à certains passages où les artistes semblent comme possédés dans une forme de transe bestiale.

Il faut voir leur concert comme une expérience sensorielle et immersive, où nous sommes invités à vibrer aux sons des instruments, au lâcher prise et à la danse. Lyon l’a bien compris et on ressent une forme de libération des corps au fil des minutes qui passent, pour aboutir à une transe qu’on ressent dans l’ensemble de la salle, témoignant de la richesse des compositions d’Heilung qui n’est, qu’on se le dise, plus vraiment à prouver.

Et alors que les musiciens clôturent leur concert dans un silence religieux, prenant tout de même le temps de nous remercier, la procession quitte la scène avec la même intensité dans le silence qu’à son arrivée. Alors que le rideau se ferme, le public reprend ses esprits et se disperse dans le crépuscule, le corps libéré, l’esprit libre et empli de souvenirs.