Nous avions déjà échangé avec Christopher lors de son tout premier concert français à la Boule Noire en 2020. Aujourd’hui à l’occasion de son retour à Paris en concert au Badaboum, le danois a accepté de nous voir à nouveau.
Pozzo Live : Beaucoup de choses se sont passées depuis la dernière fois qu’on s’est vus il y a trois ans.
Christopher : Le monde s’est arrêté !
Pozzo Live : Tout à fait. Mais surtout de votre côté un nouvel album, un film et sa BO, mais surtout la naissance de deux enfants. Félicitations !
Christopher : Merci beaucoup. Un film et deux enfants depuis la dernière fois qu’on s’est vus, c’est fou.
Pozzo Live : J’aimerais commencer avec votre album, My Blood, sorti en 2021. Quand on s’est rencontrés en février 2020, le single Ghost était déjà sorti, mais le monde a été mis en quarantaine un mois plus tard. Est ce que l’album était déjà prêt ou est-ce que vous avez dû changer tout votre planning ?
Christopher : Non, j’ai décidé de ne pas le changer. Parce-que quand le COVID est arrivé je me suis dit au début que ça serait probablement terminé au bout d’un mois ou deux. Je me suis donc demandé si on allait rester sur ce planning. Mais on a sorti deux single de plus et c’était une période un peu étrange. Je venais juste de devenir père et j’étais à la maison avec mes enfants donc c’était un peu un mal pour un bien parce-que sinon j’aurais été en pleine tournée. J’ai sorti Leap of faith puis Good to goodbye après Ghost et ça a été tout pour cet album. Il est maintenant disponible, et j’ai commencé à en écrire un nouveau.
Pozzo Live : En 2020 et 2022, vous avez sorti deux singles avec l’artiste asiatique Chung Ha. Est ce une artiste que vous connaissiez déjà avant et avec laquelle vous vouliez collaborer ? Comment cette collaboration est arrivée ?
Christopher : Je la connaissais déjà, on a fait pas mal de concerts ensemble en Corée du Sud. Bien évidemment elle fait de la K-Pop, mais elle a entendu la chanson Bad boy que j’ai écrite et je crois que c’est elle qui a dit ‘Je veux être sur cette chanson !’. Et c’est ce qu’il s’est passé.
A cause du COVID, j’étais à Copenhague. Elle a donc enregistré sa voix en Corée du Sud et l’a envoyée. Pour la vidéo elle a filmé de son côté en Corée du Sud et j’ai fait pareil à Copenhague. Ce n’est que lorsqu’on a enregistré When I Get Old que l’on s’est vraiment rencontrés pour la première fois en chair et en os. J’ai fait un gros concert en Corée du Sud, on a fait trois concerts à guichet fermé d’affilée et elle a sauté sur scène avec moi et on a chanté ces deux chansons ensemble… C’était un sacré moment !
Pozzo Live : Parlons maintenant d’un assez gros sujet ; un film Netflix qui a rencontré un grand succès : A Beautiful Life. Est-ce que vous avez écrit la bande originale de la même façon que vous avez écrit vos autres chansons ? Est-ce que la bande originale a été composée avant, pendant, ou après que vous ayez lu le script ?
Christopher : Ça a été un mélange de tout ça. J’avais écrit A beautiful life avant. J’ai ensuite écrit les autres chansons pendant que le script se faisait. Ça a été un genre de course en parallèle. Pendant que Steph et les autres auteurs écrivaient le script, moi je faisais les chansons de mon côté en même temps. Nos chemins se sont un peu croisés et on a mis des paroles de mes chansons dans les dialogues du film, ça a été très bien fait, de façon très intelligente. C’est très bien écrit, mais ça reste différent. Ça a été très différent pour moi d’écrire ça parce-que je ne le faisais pas pour moi-même.
En fait, j’écrivais dans la peau de ce personnage, Elliot Winter, et lui et moi on est très différents, bien sûr, c’est un peu plus mélancolique, ça prend plus aux tripes. Lui c’est un peu ce pêcheur presque dépressif et moi je suis plutôt un mec enjoué et très dynamique, donc c’était super différent et ça a été un vrai challenge mais c’était très marrant à faire et je suis forcément super fier de cet album et de ce film. J’ai passé un an, un an et demi à me préparer, puis on a tourné pendant six mois. Donc le fait qu’il sorte enfin et qu’il explose de cette façon, qu’il devienne numéro 1 sur Netflix dans à peu près 70 pays, j’étais super impressionné, c’était dingue, vraiment très cool.
Pozzo Live : La chanson A beautiful life, traite d’un sujet qui touche beaucoup de gens [Ndlr : le narrateur apprend qu’il va être papa et cela chamboule sa vie]. Est-ce que vous avez été inspiré par votre propre expérience, celle de devenir père pour la première fois ?
Christopher : Oh oui, bien entendu. J’ai écrit cette chanson, il me semble, environ deux semaines après que ma femme m’a appris qu’elle était enceinte de notre premier enfant. Je me suis dit ‘merde’. En fait, je me suis dit ‘ok ma vie entière va changer’ en fait, et ça a été le cas. Et c’est ça la beauté d’avoir des enfants. On dit au revoir à une période de notre vie et on accueille cette nouvelle partie. Et ça m’a fait pensé au fait que, à un moment il vont finir par déménager et je vais devoir dire au revoir à ce qui selon moi est ma ‘beautiful life’ à nouveau.
C’était un peu cette chanson façon ‘L’histoire de la vie’, j’ai vu ma vie entière défiler devant mes yeux. Tout ce que j’ai connu jusqu’à présent, c’était les sorties avec mes copains, à boire des bières en toute liberté. Et d’un coup je suis père de famille, j’ai toutes ces responsabilités, cette petite fille dont je dois m’occuper. C’est la plus belle chose que j’ai pu expérimenter dans ma vie, mais c’est aussi un truc qui change complètement la vie… Quand quelqu’un débarque et change l’image et te dit ‘non, maintenant, c’est elle la personne la plus importante de ta vie’, c’est juste… Je pense aussi que c’est une expérience super saine à faire. Pour moi, ça a été comme tomber amoureux à nouveau, ça a été quelque chose d’incroyable.
Pozzo Live : Vous avez écrit la bande originale du film, donc, mais vous en êtes aussi l’acteur principal. Est-ce que ça a été votre première expérience filmique ? Sachant que les clips et vidéos musicales ne comptent pas. Comment est-ce que vous vous êtes préparé ?
Christopher : Ça a été une longue préparation. Bien évidemment, ça a été mon premier vrai rôle. J’avais déjà eu une petite expérience par le passé, mais ça a été la première fois où je me suis dit que ça allait prendre des mois et des mois de préparation pour m’habituer à tout ça. Le réalisateur, Mehdi, m’a aidé à faire beaucoup d’exercices, des exercices de comédie.
C’était globalement comme un cursus scolaire avant qu’on commence à filmer. J’étais super nerveux et ça a été un vrai challenge mais aussi très marrant. Ce qu’il y a, c’est que pour moi jouer la comédie c’est aussi sortir de sa zone de confort. C’est complètement oser et être assez courageux et être dans l’instant présent. Il y a eu beaucoup de préparation de mon côté, donc oui c’était une expérience très cool, mais comme c’est le cas pour toutes les premières fois, ça a été très éprouvant.
Pozzo Live : Le résultat rend vraiment très bien !
Christopher : Merci. Vous l’avez regardé en français, avec le doublage français ?
Pozzo Live : Non, je l’ai regardé en V.O. en danois, avec les sous-titres français. D’ailleurs est-ce que c’est vous qui faites le doublage anglais ?
Christopher : Oui j’ai doublé la version anglaise, mais c’est la seule que j’ai faite, pas la version allemande. J’aurais peut-être pu faire la version allemande mais non, ça aurait été trop…
Pozzo Live : Comme vous l’avez dit vous-même, le film a rencontré un énorme succès, ça se voit d’ailleurs avec le concert de ce soir dont les places se sont vendues très rapidement. Vous allez devoir jouer dans une salle plus grande la prochaine fois !
Christopher : Bien entendu, bien entendu. Enfin… J’espère que ce qu’on va faire ce soir va impressionner les gens, en fait. Comme ça la prochaine fois qu’on sortira quelque chose ils le diront à leurs amis et ils reviendront et on sera dans une salle avec 1 500 personnes. Ça serait super cool. C’est un peu ce qu’il se passe partout où on est déjà allés par le passé, quand on s’était rencontrés. C’étaient de plus petites salles, de la taille de celle-ci à peu près, mais cette fois tout est à guichet fermé, ce sont de grandes salles. C’est incroyable de voir ça, de voir le public s’agrandir de cette façon, c’est juste… On se dit que tout ce travail, ça en vaut la peine. C’est vraiment cool de voir tout grandir de cette façon.
Pozzo Live : Est-ce qu’il vous arrive parfois encore de jouer Against the odds sur scène ?
Christopher : Non, pas du tout. En fait, j’ai l’impression qu’à l’époque j’étais quelqu’un de très différent. Enfin, bien évidemment je ne suis plus au même point qu’à ce moment-là. Mais j’ai plutôt envie de jouer les derniers morceaux que j’ai écrit. J’ai envie que sur scène on puisse voir un homme de 31 ans et pas un gamin de 18 ans. J’ai envie de jouer de la musique qui a du sens pour moi à l’instant T et que je prends plaisir à jouer. Au fond, j’imagine que quand tu joues quelque chose qui te fait vraiment plaisir, c’est le sentiment que tu donnes aux gens. Donc oui, j’en ai fini de jouer Against the odds.
J’ai l’impression que c’était y’a une éternité. D’ailleurs, j’ai réalisé que j’avais 18 ou 19 ans quand c’est sorti, que j’ai signé chez Warner à 17 ans et qu’en fait ça représente littéralement la moitié de ma vie. J’ai été l’adolescent idole des jeunes au Danemark et il a fallu beaucoup de temps avant qu’on me prenne au sérieux en tant que compositeur-interprète plus adulte. J’ai réellement dû me battre pour en arriver là et maintenant que j’y suis, c’est hors de question que je retourne à cette image d’adolescent. Je reste là où je suis, je suis bien à ma place actuellement, c’est ce que je ressens.
Pozzo Live : Et vos morceaux plus récents sont très bons , donc tout va bien. D’ailleurs est-ce qu’il vous arrive parfois de changer la setlist d’une même tournée pour pouvoir jouer différentes chansons plus vieilles chaque soir ?
Christopher : Oui, bien sûr. On vient juste de le faire, d’ailleurs. On était en Chine la semaine dernière, pour deux semaines. Jai des chansons qui sont de gros tubes là-bas mais qui ne le sont nulle part ailleurs. Il y a une chanson qui s’appelle Waterfall et l’autre c’est Heartbeat, qui est sur mon deuxième ou troisième album. On l’a faite en Chine, et on en a fait quelques autres, mais là on ne va plus les jouer. Par contre, s’il y avait des chansons du premier album qui avaient rencontré un énorme succès en France, si Against the odds était très célèbre ici – par pure coïncidence – je les jouerais, en fait. Parce-qu’au fond on a envie de jouer les chansons que les gens veulent entendre,. Mais s’il n’y a pas d’énorme succès qui se démarque, alors je joue simplement ce dont j’ai envie.
Pozzo Live : C’est une bonne idée. Par rapport à la Corée et à l’Asie en général, j’ai remarqué l’autre jour – en faisant des recherches à propos de votre carrière – que vous aviez un succès énorme en Corée. Ça arrive parfois que des artistes Européens ne rencontrent pas un grand succès dans leur pays d’origine mais explosent en Asie.
Christopher : Effectivement, mon projet a connu un réel succès en Asie avant d’être réellement connu ailleurs. Aujourd’hui encore, je pense que la Corée est mon plus gros marché, en fait. C’est assez fou d’aller là-bas et de remplir une salle de 15 000 personnes, puis ensuite de venir ici à Paris et jouer devant 300 personnes. C’est un contraste assez cool, j’adore les deux possibilités ; que ce soit jouer dans des stades immenses ou dans des clubs super intimistes. En réalité, j’aime juste être sur scène, jouer en live… Donc peu importe où ça nous mène, on ira.
Pozzo Live : Et on est très content de vous voir revenir ici !
Christopher : Moi aussi ! C’est une de mes villes préférées au monde. Ça fait cinq ans que je suis marié et ma femme Cecilie et moi on a passé beaucoup de temps ici parce qu’elle a habité à Paris pendant quelques années; Elle parle français couramment et elle adore tout ce qui est français. Notre fille aînée s’appelle Noëlle et, en fait, y’a tellement de choses dans notre vie qui ont une connexion avec cette ville juste parce-que je l’aime et qu’elle aime cet endroit.
Pozzo Live : Quel artiste ou groupe nous conseillez-vous d’interviewer la prochaine fois ? La dernière fois vous aviez répondu Billie Eilish. Une autre proposition ?
Christopher : Le prochain artiste que vous devriez interviewer ? Oh… Il y a beaucoup d’artistes que j’écoutes en ce moment et que j’adore. Il y a cette fille, Lizzy McAlpine, elle a une chanson qui s’appelle Ceilings qui est magnifique. Je crois qu’elle est canadienne, ou peut-être Américaine je ne suis pas sûr [Ndlr : Américaine]. Et ensuite il y a ce mec, un artiste de country qui s’appelle Zach Bryan. C’est un jeune gars qui était dans l’armée et qui écrit des chansons magnifiques. Je pense que ce serait marrant de l’interviewer. L’un de ces deux-là, voilà ma réponse.
Merci à Christopher pour son temps et à son équipe pour leur accueil.
Interview réalisée à Paris le 13 novembre 2023.