Nous avons échangé avec Ryan Guldemond le chanteur du groupe Mother Mother. Les canadiens étaient en ouverture du deuxième concert d’Imagine Dragons à Paris la Défense Arena. Nous avons pu nous entretenir avec le musicien débordant de gentillesse.

Pozzo Live : Bonjour, comment est-ce que ça va ? Assez reposé ? prêt pour le concert ? 

Ryan Guldemond : Bonjour. Je vais bien. Et oui, je me sens prêt. Nous avons joué avec Imagine Dragons plusieurs fois, donc nous savons en quelque sorte le… Nous connaissons le programme, pour ainsi dire.

Pozzo Live : Comment en êtes vous venu à faire la première partie d’Imagine Dragons ?

Ryan Guldemond : Eh bien, nous les avons rencontrés l’été dernier lorsque nous jouions toute une tournée européenne en ouverture pour eux. Et donc nous sommes devenus amis, et ils nous ont demandé de revenir jouer un concert à Paris. Et donc, bien sûr, nous disons oui chaque fois qu’ils le demandent.

Pozzo Live : Vous revenez en France après peu de concerts depuis le début de votre carrière [Ndlr : 2005]. Vous ne vous êtes pas énormément produit en France si je ne trompe pas ? 

Ryan Guldemond : Nous existons depuis longtemps. Au cours des 18 dernières années, nous avons probablement joué en France peut-être 10 fois.

Pozzo Live : Comment trouvez-vous le public français ? Vous avez tout à fait le droit d’être honnête !

Ryan Guldemond : [Rires] C’est toujours assez impressionnant, surtout à Paris. Ouais, les gens sortent avec beaucoup d’ouverture d’esprit.

Pozzo live : Avez-vous déjà jouer dans d’autres villes que Paris en France ? 

Ryan Guldemond : Oui, nous avons joué à Lille, en France. C’est ça. Paris et Lille. Mais oui, les gens, ils sont bruyants et excités et passionnés. Et c’est toujours un grand moment. Et la culture est belle. La nourriture est délicieuse. Nous aimons venir en France. Je ne le dis pas à la légère. C’est super.

Pozzo Live : Les chansons Verbatim et Hayloft étaient très populaires sur TikTok et Instagram il y a quelque temps – avez-vous vu quelque chose de tout cela ? Comment vous êtes-vous senti à ce sujet ?

Ryan Guldemond : Oui, nous sommes vraiment connectés à TikTok et à notre base de fans et les chansons virales. Nous nous sentons incroyablement chanceux. Nous ne l’avions pas vu venir, c’est vraiment une surprise. Et cela a en quelque sorte changé nos vies. Cela nous a ouvert sur le monde, nous a donné de nouvelles opportunités. Et tout s’est passé par magie, on dirait. Il n’y avait pas stratégie. Il n’y avait pas de plan de communication. C’est juste tombé du ciel un jour. Et tout a changé. Donc voilà, nous remercions notre bonne étoile et essayons ne pas le prendre pour acquis.

Pozzo Live : En parlant de vidéos, vous allez sortir une vidéo de fan sur le titre Normalize, pour préparer la sortie du nouvel album. Une date a-t elle déjà été déterminée pour l’album ?

Ryan Guldemond : La vidéo des fans est géniale. C’est vraiment très beau. Notre communauté de fans est vraiment belle et créative avec des gens formidables. Et ils brillent vraiment dans cette vidéo. Par ailleurs nous avons des singles qui sortiront les prochains mois. Et puis enfin un album début 2024.

Pozzo Live : Si je ne me trompe pas, vous avez quitté Last Gang Records pour produire vous-même l’album « Inside » ? 

Ryan Guldemond : Oh, Last Gang, nous avons laissé ce label il y a de très nombreux albums. Il y a 10 ans, je dirais. Ouais. Et puis nous sommes allés chez Universal et maintenant nous sommes chez Warner. Donc nous avons fait plusieurs labels tout au long de notre carrière.

Pozzo Live : Ah d’accord j’avais cru voir passer que vous aviez quitté Last Gang pour produire vos albums vous même. 

Ryan Guldemond : Non, nous sommes passé chez Warner pour « Inside« . Et puis le prochain disque qui sortira en 2024 sera notre deuxième enregistrement sur Warner.

Pozzo Live : Vous avez désormais 8 albums, 9 bientôt. Comment créez-vous vos setlists ? Essayez-vous de mettre des raretés différentes dans chaque spectacle ou tournée ?

Ryan Guldemond : Et bien déjà tu dois jouer … Enfin tu n’es pas obligé, mais je pense que tu es censé jouer les chansons que les gens connaissent et aiment. Ce que certains appellent les « hits ». Donc jouer les chansons que la plupart des gens aiment. C’est un peu les bonnes manières. Être simplement poli et respectueux envers votre public.

Et puis une fois que tu as fait ça, il te reste de la place pour peut-être quatre ou cinq nouvelles chansons du nouvel album. Vous faites donc de la promotion en quelque sorte. Et puis tu as quelques places pour faire quelques moments magiques. Des moments où c’est quelque chose de différent, quelque chose hors de l’ordinaire. Par exemple une cassure du rythme avec un moment acoustique. Il y a peut-être une interaction avec les fans. Donc il y a un peu une architecture. Je pense que c’est ce qui fait la « setlist parfaite ». Et nous avons tendance s’en tenir à cette formule parce que ça marche bien. Et puis cela semble faire plaisir aux fans. C’est la chose la plus importante pour nous.

Pozzo Live : Est-ce que vous vous mettez au défi parfois à changer la setlist spectacle après spectacle ?

Ryan Guldemond : Nous nous en tenons généralement à une seule setlist sur une tournée simplement parce-que nous cherchons quelque chose d’orchestré. Nous avons tellement travaillé sur la création des enchainements d’une chanson à la suivante, c’est très réfléchi. Nous mettons tout notre travail et notre créativité à préparer cela. Et puis nous aimons présenter ce travail au public au cours d’une tournée.

Pozzo Live : Vous avez presque fini votre tournée. Nous nous demandions comment vous gériez les tournées ? Avez-vous des rituels qui vous aident à vous motiver ? Ou quels défis avez-vous rencontrés en tournée ?

Ryan Guldemond : Effectivement être en tournée peut être difficile. Oui, dormir est difficile. Et c’est facile de tomber malade parce que tu es en voyage. Vous êtes dans un bus, vous êtes dans un avion. Pour moi, j’aime marcher le plus possible avec mon appareil photo. Comme à Paris, si j’ai deux heures, je vais me promener et prendre des photos de statues et des bâtiments. Et pour moi, vraiment ça m’éloigne du monde, de la vie en tournée. C’est très rafraichissant. Et c’est bon pour mon humeur et ma santé, ma santé mentale. Simplement s’évader et faire quelque chose d’épanouissant, ce n’est pas de la musique. Et puis tu reviens et tu fais la musique et vous avez plus d’énergie grâce à cela.

Pozzo Live : A propos de cela est-ce que vous avez des passions ou des hobbies hors de la musique ?

Ryan Guldemond : La musique prend vraiment beaucoup de temps. Donc si j’ai du temps libre, j’essaie de me connecter avec la nature et faire de l’exercice. Rendre visite à des amis également. J’aime lire et écrire, manger de la bonne nourriture, juste vivre une bonne vie. Tu prends soin de toi et tu reviens ensuite en studio pour de longues heures, où tu ne dors pas beaucoup. Ton cerveau est en surchauffe. Tu peux devenir fou en studio parce-que tu tiens tellement à faire ta chanson correctement. Et tu perds en quelque sorte ton esprit. Et donc quand tu ressorts de là, il faut se recalibrer. Tu dois te remettre au vert. Tu dois revenir à quelque chose de plus de calme, te recentrer. Et puis tu recommences et perds à nouveau la tête.

Pozzo Live : Est-ce que nous aurons une chanson exclusive du prochain album ce soir ?

Ryan Guldemond : Disons que c’est un secret.. Mais non, elles ne sont pas tout à fait prêtes.

Pozzo Live : Encore trop d’appréhension pour les jouer sur scène ? 

Ryan Guldemond : C’est juste nous voulons nous assurer que c’est incroyable avant d’enregistrer notre album. A tel point que nous sommes partis en tournée avant de le finir. Donc il n’y avait vraiment pas de timing défini, nous voulons bien préparer ces nouvelles chansons. Donc l’année prochaine, nous aurons des centaines de dates et c’est l’année où nous allons présenter ces nouvelles musiques. Nous sommes toujours dans l’ancien cycle en ce moment. Dans les limbes.

Pozzo Live : Vous avez parlé de sortir plusieurs singles les prochains mois. Est-ce que vous pensez que les plateformes de streaming poussent vers l’arrêt du format album que l’on connait ?

Ryan Guldemond : Oui, un petit peu. Je pense que tout est plus orienté singles maintenant. Et je pense que les gens passent très vite à autre chose. Donc, si vous deviez publier tout votre album demain … Il y a beaucoup de bruit dans le monde. Les gens pourraient écouter et juste passer à autre chose. Et donc je pense que sortir les singles, menant à votre album, c’est un moyen de prolonger ce moment où les gens oublient l’album et passent à autre chose.

Honnêtement, je pense que c’est un moyen, une stratégie, pour faire en sorte que la campagne d’albums dure plus longtemps qu’elle ne le serait si tu attendais et sortais tout l’album d’un coup. Les gens pourraient dire que c’est triste, ou devenir nostalgique, mais c’est comme ça. Et tu dois en quelque sorte trouvez-y la beauté, y trouver l’innovation. Et ne pas vouloir freiner ça. Parce-que si tu n’es pas d’accord avec l’évolution, alors je pense que tu vas avoir beaucoup de frustration dans la vie.

Pozzo Live : Je suis un peu nostalgique du format physique, mais bon j’ai de l’espoir car le vinyle n’a jamais aussi bien marché. 

Ryan Guldemond : Je pense que nous sommes humains, donc nous avons envie contact physique avec des choses. Et je pense que tout le monde devrait acheter un lecteur de vinyles. Tous ceux qui aiment la musique devraient écouter des vinyles, parce-que c’est une belle expérience. Tu as l’impression d’être dans un espace privé avec la musique.

Parfois quand j’écoute  de la musique en streaming, j’ai l’impression d’être dans une pièce avec huit milliards de personnes. C’est comme si tu étais dans une mer de uns et de zéros. Ce n’est pas privé. Et je sais que c’est un peu dans la tête, mais ça compte, non ? Le sens des choses importe. Et donc si je suis à la maison tout seul avec vinyle, il n’y a que moi. Je le tiens dans mes deux mains, j’ai l’impression d’avoir une expérience privée avec la musique que j’aime et personne ne le sait. Et sur Internet, ce n’est pas comme ça.

Pozzo Live : Ce n’est définitivement pas la même expérience.

Ryan Guldemond : Non, c’est très différent. C’est plus chaleureux, et plus consistant, et peut-être même plus terne. Et je pense que les gens sont tellement nostalgiques et si romantique, qu’ils disent que ça sonne mieux. Mais c’est juste différent. Cela ressemble à ça et la musique numérique ça ressemble à ça. Et on n’est pas vraiment meilleur, ou pire, c’est juste différent. Mais je pense que nous attachons cette idée du meilleur et du pire à travers l’objectif de romance et nostalgie.

Pozzo Live : Est-ce qu’il y a quelque chose dont vous auriez aimé parler en interview qui n’est jamais arrivé ? 

Ryan Guldemond : Pas vraiment. Je suis plutôt timide de nature. Je suis calme par nature. Et ainsi honnêtement les interviews … c’est adorable, vous l’êtes tous les deux. Je suis reconnaissant pour les interviews parce-que cela donne au groupe une opportunité d’être découvert. Et cela aide notre mission de partager notre musique avec le monde. Mais moi personnellement, en tant qu’humain, je ne suis pas nécessairement accompli en parlant beaucoup dans la vie. Vous voyez ce que je veux dire? Donc c’est plutôt, je suppose, une réponse philosophique.

Pozzo Live : C’est super intéressant. Parce-qu’en tant que chanteur vous êtes mis en lumière devant des milliers de personnes. Et à côté de ça vous avez ce côté plus calme et réservé.

Ryan Guldemond : C’est un peu ironique, non ? Je pense que beaucoup de gens se lancent dans la création artistique parce-qu’ils ne savent pas comment s’intégrer au monde. Ils ne savent pas comment interagir, communiquer. Et ainsi ils trouvent cet autre chemin. Et s’ils ont de la chance, leurs créations deviennent désirées, vont intéresser les foules. Mais alors la conséquence c’est que les gens vont vouloir savoir qui est derrière ces créations. Et ainsi le timide artiste qui a fait sa musique comme une évasion du monde se retrouve parfois dans un portail vers le monde, dans un sens plus large. Et donc ils disent : « Attendez une minute. Ce n’est pas ce que je pensais ». Mais comme je l’ai dit, je suis vraiment reconnaissant pour l’opportunité de se connecter et parler lors d’interviews et promouvoir le groupe. Mais oui, je reconnais la problématique pour les artistes introvertis parfois. Je comprends.

Pozzo Live : Quelle groupe ou artiste vous conseilleriez à Pozzo Live d’interviewer ensuite ? 

Ryan Guldemond : Je dirais Patti Smith parce qu’elle est si intelligente et chaleureuse. Elle a tellement d’expérience, et vu tellement de changements dans l’industrie de la musique au cours des 40 dernières années. Et elle aime Paris !

Merci à Ryan Guldemond pour son temps, et merci à Warner. 
Interview réalisée par Gaël et Joanna le 23 août 2023.

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