The Rasmus vient de sortir son nouvel album Weirdo le 12 septembre 2025. Nous avons eu l’occasion d’échanger à ce sujet avec le batteur Jarno Lahti et le bassiste Eero Heinonen.
Pozzo Live : Bonjour, comment est-ce que ça va ? Pas trop stressé par la sortie de l’album qui arrive ?
Eero Heinonen : C’est plutôt un sentiment d’anticipation. On attend le moment où l’album va sortir, où les gens vont commenter toutes les chansons, et c’est excitant. On travaille dessus depuis longtemps.
Jarno lahti : Ce n’est pas seulement l’album, c’est aussi la tournée qui commence le même jour, donc beaucoup de choses se passent. Mais ce n’est pas du stress, c’est une bonne ambiance. Comme je l’ai dit, c’est agréable d’être actif, de sortir, de partager les chansons avec les gens, de rencontrer les fans. J’adore ça.
Pozzo Live : Quand est-ce qu’a démarré l’écriture de cet album ? Est-ce que vous avez pu avoir un développement « normal » ? Rise étant sorti peu après le retour à la normale post-covid.
Eero Heinonen : Oui, donc le précédent album était bien sûr assez difficile, car on ne pouvait même pas être dans la même pièce pour parler des chansons. Et là, on a vraiment travaillé pendant longtemps. On a commencé en été 2023, et Lauri avait déjà plusieurs chansons, quelques idées à ce moment-là, et certaines chansons sont venues plus tard. Mais pendant cette session, on a d’abord discuté de manière créative avec Lauri, pour voir quelles chansons semblaient les meilleures, et sur quoi on voulait commencer à travailler. Ensuite, on a eu des sessions.
Jarno lahti : On a fait une session de démo, c’était assez drôle. C’était le premier contact : on est restés une semaine en studio, juste à jouer les chansons et à s’amuser. À ouvrir un nouveau chapitre pour le groupe, une nouvelle étape, ou peu importe comment on l’appelle. Puis on a eu la chance d’aller à Nashville pour enregistrer l’album avec Desmond Child, qui est un super producteur, un super gars. On avait déjà travaillé avec lui avant, en 2008 ou 2009 je crois.
Eero Heinonen : Oui, pour l’album Black Roses.
Jarno lahti : Donc on y est allés quelques semaines pour enregistrer, et c’était un voyage inspirant dans la ville de la musique, Nashville. Il y avait aussi un autre producteur, Marti Frederiksen, donc on a pu travailler avec de grands talents. Lauri est le principal compositeur, il écrit tous les textes de l’album. En tant que groupe nous avons une forte contribution sur les arrangements, les sons et tout le reste. On est un groupe, comme beaucoup, mais chez nous, ce n’est pas une seule personne qui décide de tout. On est plutôt démocratiques dans ce sens : chacun peut proposer des idées. Et c’est une manière très saine de travailler la musique en groupe, comme une unité.
Pozzo Live : Comme vous l’avez dit, c’est un nouveau chapitre. Est-ce que vous avez utilisé d’anciennes idées ou bien êtes-vous complètement parti de zéro ?
Eero Heinonen : Je pense qu’on avait une chanson qui avait été un peu produite entre les deux albums, et qui flottait un peu dans l’air. Mais on a surtout commencé de zéro. Et je crois que l’une des premières choses que Lauri a proposées, c’était une idée pour une chanson appelée Weirdo. C’est une histoire qui vient de Lauri, c’est assez personnel. Il pose la question aux gens autour de lui : « Qui voyez-vous quand vous me regardez ? » Parce que je ne suis pas normal. Je suis bizarre, ou un « weirdo ». Et à vos yeux, vous pensez peut-être que je devrais faire autre chose, comme un travail normal ? Mais je ne ressens pas ça, je ne rentre pas dans ce moule. Donc c’est une sorte de célébration de la différence, de l’étrangeté, et de l’acceptation de cette bizarrerie. En général, dans le monde, pour tous ceux qui se sentent différents de la norme. Je pense que c’est un thème important, un élément central de l’album.
Jarno lahti : C’était un mot-clé pour l’album : weirdo. Et naturellement, c’est devenu le nom de l’album.
Pozzo Live : Et c’est un super message. Quand des groupes disent « tu n’es pas bizarre, tu es juste comme nous en fait ».
Jarno lahti : On reçoit beaucoup de messages de fans qui disent : « Je fais partie des weirdos aussi. Je suis l’un d’eux. Merci de le dire à voix haute. » Et c’est OK d’être qui je suis, comme je suis. Les gens devraient être plus ouverts d’esprit et plus bienveillants les uns envers les autres. Weirdo est un mot positif. Ce n’est pas négatif à mes yeux.
Pozzo Live : Votre troisième single, Break These Chains, est en featuring avec votre compatriote Niko Vilhelm de Blind Channel. Comment s’est faite cette collaboration ? Vous vous connaissiez d’avant ?
Eero Heinonen : La Finlande est un petit pays, et bien sûr, la scène musicale est assez réduite. Donc on finit par connaître beaucoup de gens personnellement, ou on les croise dans les festivals. Ou si quelqu’un fait de la bonne musique, tu dis : « Hé, j’ai entendu ton truc. On devrait bosser ensemble. » Et ils répondent : « Oui, faisons-le un jour. » Et je pense que c’était l’un de ces moments. J’apprécie vraiment la façon dont Nico chante. Il a quelque chose d’éthéré dans sa voix qui colle parfaitement à cette partie de la chanson. J’aime ça.
Pozzo Live : Alors, on peut espérer une collaboration avec Lordi ?
[Rires général]
Jarno lahti : C’est facile d’appeler Nico, c’est un mec sympa. Mais Lordi, j’ai trop peur de l’appeler.
Pozzo Live : Mister Lordi est quelqu’un de très sympa pour avoir échangé avec lui. Et pourtant il était dans son costume de monstre.
Jarno lahti : Ça doit être chaud. Imagine un festival d’été dans ce costume.
Pozzo Live : En parlant de collaboration, je me dois d’évoquer votre récente apparition sur Say It Again de Bad Wolves. On imagine que c’est votre label commun qui a permis cette rencontre ?
Jarno lahti : Oui, Lauri est sur l’album. Il chante sur l’album, mais on ne joue pas sur la chanson. Je crois que l’idée vient de notre nouveau label, Better Noise Music, qui est aussi le label de Bad Wolves. Et c’était dans l’air depuis un moment. Puis tout à coup, ils ont dit : « Oui, on va sortir ça. » Je pense que c’est une version deluxe de l’album, ou du single, je ne sais plus. Mais c’est une belle chanson. Et je crois qu’il y avait quelque chose dans cette chanson. Je suis content qu’on en fasse partie maintenant.
Eero Heinonen : Récemment, j’ai commencé à comprendre à quel point c’est bien d’avoir des collaborations sur ses morceaux, et de participer à ceux des autres. Parce que ça soutient tout le monde. C’est vraiment bénéfique. Disons peut-être que le rock ne vit pas son plus grand moment en ce moment. Mais si on peut faire connaître la musique d’autres groupes, et si d’autres groupes peuvent nous aider aussi… On adore aussi partir en tournée avec d’autres groupes et ce genre de choses. Donc tout ça, je pense que ça rend les choses plus fortes pour tout le monde. Par exemple, les collaborations qu’on a eues sur notre album — Lee Jennings du groupe The Funeral Portrait et le chanteur de Blind Channel, Niko — collent vraiment bien aux chansons.
Jarno lahti : Et aussi côté tournée, nous avons joué avec Lee Jennings et The Funeral Portrait aux États-Unis. C’était en avril ?
Eero Heinonen : Avril et mai.
Jarno lahti : Avril et mai, surtout mai. Et maintenant, on les fait venir pour jouer avec nous pendant quatre semaines en Europe et au Royaume-Uni. Donc c’est sympa d’avoir un groupe ami aux États-Unis, et ce sont vraiment des gars bien. C’est bien qu’ils soient aussi sur l’album.
Pozzo Live : Revenons sur votre album Weirdo. Vous proposez du nouveau contenu, mais restez fidèles à vous-même. Est-ce que vous gardez une même façon de faire pour autant garder cette qualité d’écriture ou au contraire vous essayez d’innover, de vous inspirer de nouvelles choses ?
Eero Heinonen : Je pense que la qualité pour écrire une chanson c’est d’écrire quelque chose de vrai. Ou du moins qui signifie quelque chose pour vous. Pas forcément de chercher quelque chose de cool, qui ne sera peut-être plus cool dans six mois.
Par exemple, la dernière chanson de l’album est une sorte de lettre au fils de Lauri. Et à cause des circonstances de la vie, ils ont fini par vivre dans des pays différents, séparés. Et cette chanson a une vraie intensité. Et c’est justement ce qu’on cherche dans une bonne composition. L’intensité est forte, et on ressent quelque chose quand on la chante, quand on l’écoute, quand on la joue. Je pense que c’est ça, le plus important.
Jarno lahti : Je dois parler des paroles. J’aime bien le fait qu’elles viennent de la vraie vie, qu’elles parlent de ce qui se passe dans le monde aujourd’hui, de choses concrètes. Ça rend la musique plus spéciale, plus authentique. Côté musical, on a toujours eu la chance de travailler avec de très bons producteurs. Certains disent que cet album est un peu plus heavy, et c’est peut-être vrai.
Eero Heinonen : Certains sons sont plus proches du metal, ce qui est bien, car ça colle à l’ambiance des chansons. Ce n’est pas que du metal. Il y a aussi des morceaux plus punks, comme Banksy, et la dernière chanson. L’avant-dernière chanson est aussi un mélange de pop et de pop rock. Donc oui, je pense que… Les sons metal sont intéressants, car on n’a pas trop exploré ce style jusqu’ici. Mais maintenant, par exemple, Rest In Peace, avec son riff. Ce sont des éléments nouveaux et frais qu’on n’avait pas utilisés depuis longtemps. Ou peut-être qu’on les utilisait au tout début du groupe, mais là, on y revient. Et ça fait du bien.
Pozzo Live : Vous avez sorti 4 singles sur les 10 morceaux que compte l’album. Est-ce que vous pensez que le format album tel qu’on le connaît tend à disparaître ?
Eero Heinonen : C’est une bonne question. On est un groupe qui aime travailler sur un album avec une idée forte derrière. Un ensemble cohérent de chansons, et un thème. Oui, mais je connais aussi des groupes qui fonctionnent autrement, qui disent : « On veut sortir une chanson chaque mois, tout le temps. » Peu importe si c’est un album ou pas, on sort de la musique en continu, et la qualité doit rester élevée. C’est une autre façon de faire, et c’est aussi une approche professionnelle, mais on ne l’a pas encore testée. On pourrait essayer.
J’adore écouter de la musique sur CD, parce que j’ai grandi avec la collection de mon père, et c’était la bonne manière d’avoir un bon son, et c’était très simple à utiliser. Mais le streaming est tellement plus pratique, enfin… Je ne sais pas si c’est vraiment plus pratique. Quand tu mets un disque, il y a quelque chose de spécial.
Jarno lahti : C’est tellement vrai. Un de mes albums préférés, c’est Blood Sugar Sex Magik des Red Hot Chili Peppers. Quand tu joues une chanson et qu’elle se termine, tu te mets déjà à fredonner la suivante. Parce que tu la connais par cœur. Et l’album a 16 ou 17 morceaux. C’est un album fantastique. À l’époque, les membres du groupe se disputaient pour savoir dans quel ordre mettre les chansons sur l’album. Ça n’arrive plus, je crois. Les gens ne s’en soucient plus autant.
Comme il disait, on aime faire des albums, d’une certaine manière, pour boucler quelque chose. Ça nous semble naturel. On aime faire des clips. On a fait des clips pour presque toutes les chansons. Celles qui sont sorties de cet album. Et ça nous semble juste. Tu peux entendre toute la chanson, tu peux voir l’image du groupe. Tu peux ressentir l’ambiance et l’émotion à travers le clip. Je pense que c’est encore fun de faire ça.
Les gens ont l’habitude de regarder 15 secondes maximum de quelque chose. Et de scroller tout le temps.
Pozzo Live : Vous allez bientôt vous lancer dans une tournée pour cet album. Nous avons hâte de vous voir à Paris en novembre. Est-ce qu’il y a un endroit où vous n’avez jamais joué et rêveriez de vous produire ?
Jarno lahti : Dans le monde ? On a la chance d’aller enfin jouer en Australie en janvier. Et c’est quelque chose qu’on rêvait de faire depuis longtemps. Mais ça ne s’était jamais concrétisé. Je ne sais pas pourquoi. C’est juste… C’est compliqué. Mais aussi, ces dernières années, on était tellement occupés en Europe que peut-être que le management ne voulait pas qu’on y aille. Parce qu’on avait déjà beaucoup de choses ici. Mais maintenant, on a enfin l’opportunité de rencontrer nos fans là-bas. Et c’est génial.
Eero Heinonen : Ce serait aussi très cool de faire quelque chose en Asie du Sud-Est. Ce qu’on n’a pas vraiment fait. On n’a jamais joué en Chine. On n’a jamais joué dans des pays comme la Thaïlande. Je pense que nous avon des fans en Thaïlande. Peut-être même quelques-uns au Vietnam ou des endroits comme ça. Et puis, on a un nouveau label, Better Noise Music. Et ce label a une forte présence aux États-Unis et au Canada. Donc évidemment, on veut travailler sur ces marchés maintenant. Alors, j’espère que l’année prochaine, on tournera beaucoup là-bas. Et bien sûr, l’Europe. On est Européens et on aime l’Europe. C’est un peu comme la maison. Oui, c’est comme chez nous.
Pozzo Live : En dehors de la musique est-ce que vous avez des hobbies, des passions, pour peut-être vous aérer l’esprit ?
Jarno lahti : Je viens d’acheter un endroit pas très rock’n’roll. Mais j’aime un coin à la campagne. C’est quelques cabanes au bord d’un lac. La Finlande est tellement propre et belle. J’adore la nature. Donc après tout ce chaos, ce qui se passe avec le groupe et tous les voyages, j’essaie toujours d’y aller. Et c’est un peu…
Eero Heinonen : Il appelle ça des cabanes, mais c’est comme un énorme château. Comme un manoir, un château, avec tous les chevaux. C’est quelque chose… Comme une série française. [Rires général]
Jarno lahti : Oui. Mais ça apaise ton stress ou ton agitation ou peu importe. Ça te calme. Et c’est quelque chose… Je suis très finlandais dans ce sens-là : j’ai besoin de me connecter à la nature. Après avoir été à Paris, qui est une ville immense et animée. Ou juste pour se débarrasser du tumulte qui t’entoure quand tu es en tournée, en promo, dans les aéroports. J’adore ça. C’est quelque chose d’unique et je veux vraiment préserver ces choses-là.
Eero Heinonen : Oui. La Finlande a une belle nature. J’ai une pratique de méditation. Je la fais chaque matin, ou j’essaie de la faire chaque matin. Ça fait longtemps que c’est dans ma vie, peut-être presque 20 ans. Ou plus de 20 ans ? Plus de 20 ans ! Oui. Et oui, ça fait du bien. Ça s’appelle Sahaja Yoga. Je la recommande à mes amis et aux gens que je connais. C’est vraiment bien. L’idée, c’est de lâcher toutes ses pensées. Et ça marche très bien. Même si ça ne prend que 15 minutes le matin, c’est un peu plus facile pour moi de prendre les décisions de la journée avec un esprit vide. Et peut-être aussi que certains jours sont évidemment plus difficiles. Donc c’est peut-être plus facile d’accepter que certaines choses ne se passent pas comme prévu, ou d’avoir un peu plus de flexibilité mentale. Donc tout est une question d’équilibre entre la vie de groupe et la vie personnelle.
Pozzo Live : Et dernière question, c’est la même pour tout le monde. Quel groupe ou artiste vous conseilleriez à Pozzo Live d’interviewer ensuite ?
Jarno lahti : Intéressant.
Eero Heinonen : Je pense qu’un groupe qui pourrait être intéressant pour vous, c’est Jinjer, le groupe de metal ukrainien. Et un autre, un peu plus inattendu, c’est King Gizzard and the Lizard Wizard.
Jarno lahti : Tellement dur à prononcer.
Eero Heinonen : Oui, les Australiens. Et ils sont intéressants. Je crois qu’ils ont déjà fait 20 albums, alors que le groupe existe depuis seulement 15 ans. Ou quelque chose comme ça. Ils produisent beaucoup.
Jarno lahti : Des États-Unis, il y a un groupe très intéressant qui s’appelle Bad Omens. Oui. Vous devriez vraiment, mais je ne sais pas s’ils font beaucoup d’interviews ou pas, mais bon.
Pozzo Live : Nous avons eu l’opportunité d’interviewer Jolly le guitariste de Bad Omens.
Jarno lahti : C’est un super groupe, très intéressant. Un son frais et plaisant.
Merci à Eero et Jarno pour leur temps et merci à Kinda Agency.


























