Aphelion

par Leprous

9.5
sur 10

S’il y a bien un groupe qui a divisé les critiques à la sortie de son dernier album, c’est Leprous. Entre les fans de l’ancien temps qui criaient au scandale et les personnes qui découvraient le groupe grâce au single Below, Pitfalls est un album qui a fait parler de lui.

Deux ans plus tard, nous sommes en 2021 et les norvégiens annoncent la sortie d’Aphelion, neuvième essai du groupe. Il faut dire que Leprous en a parcouru du chemin ! Après 4 premiers enregistrements très torturés et alambiqués, le groupe s’est doucement orienté vers des musiques plus mainstream, magnifiquement appuyées par la voix aussi belle que versatile d’Einar Solberg. Ainsi, Pitfalls clôturait cette éclectique discographie d’une manière pour moi très naturelle : la violence et la folie des débuts avaient fini par totalement disparaître au profit de mélodies plus douces, plus touchantes mais toujours aussi mélancoliques pour la plupart des titres. Leprous semblait alors avoir achevé sa mue et j’avais bien du mal à imaginer ce qu’aurait encore à proposer le groupe par la suite.

En décembre dernier, Castaway Angels était sur toutes les plateformes de streaming musical et prenait la place d’une sorte de morceau d’attente, une petite confiserie pour faire patienter les fans en laissant augurer qu’un nouvel album était en préparation. Un bon titre, doux et plein d’émotions qui restait dans la veine de ce qui avait été proposé sur Pitfalls. Je me disais alors que le groupe avait probablement cessé d’évoluer et nous annoncerait un Pitfalls 2.0 pour le prochain opus. Puis sept mois se sont écoulés et tout s’est accéléré : Running Low est sorti, rapidement suivi de The Silent Revelation. J’ai alors compris que j’avais peut-être eu tort dans mes prédictions : l’un était beaucoup plus torturé dans ses couplets tout en restant joyeux et presque dansant sur ses refrains, tandis que l’autre, malgré une structure relativement classique proposait des riffs comme on en avait plus entendus depuis Malina.

Finalement, le reste de d’Aphelion est lui aussi une très belle réussite. On reste sur une dynamique assez similaire à ce qui a fait le succès de Pitfalls : des tempos plus calmes (Out of Here, Have You Ever?), des refrains dans lesquels la voix d’Einar est au premier plan (Running Low, The Shadow Side, Castaway Angel) et des explosions musicales très théâtrales sur les refrains ou en fin de morceaux (Castaway Angels, On Hold). On notera aussi le retour d’un violon, notamment sur Running Low. Le groupe aurait-il définitivement embauché Raphael Weinroth Browne, le violoniste canadien qui les accompagnait sur la dernière tournée ? Quoi qu’il en soit, cet ajout de violons et toujours du plus bel effet. Mais fort heureusement, ce n’est pas tout, car sinon Aphelion ne serait qu’une pâle copie de son prédécesseur. L’album marque aussi un retour aux sources sous plusieurs aspects.

Tout d’abord, les riffs sont beaucoup plus acérés et surtout bien plus marqués : Tor Oddmund a enfin ses moments de gloire, bien trop discrets sur Pitfalls. On pensera notamment aux intros de The Silent Revelation et All the Moments dont le riff de départ me fait indubitablement penser à l’intro de Lines in the Sand de Dream Theater, ou bien encore à l’incroyable solo de The Shadow Side et son côté Guns & Roses qui n’est pas sans rappeler le solo de Fate (Tall Poppy Syndrom). De plus, Aphelion marque le retour des growls et screams d’Einar qu’on n’avait plus entendu depuis The Congregation avec le titre Slave. Bien sûr on est loin de Silent Waters, Aeolia ou encore Tall Poppy Syndrom sur lesquels ces hurlements étaient monnaie courante. Pour autant, quel plaisir d’entendre à nouveau les cris d’Einar sur Running Low et Nighttime Disguise. Cela donne à mon sens plus de profondeur aux morceaux et démontre un peu plus l’incroyable panel vocal dont le chanteur est capable.

Mais là où Aphelion tire vraiment son épingle du jeu, c’est sur Nighttime Disguise, le morceau de clôture. À l’instar de The Sky is Red sur Pitfalls, morceau un tant soi peu difficile à digérer lors de la première écoute, le groupe démontre ici tout son talent : Baard est bluffant de technique derrière les fûts, Tor nous prouve qu’il sait définitivement tout jouer, et Einar nous subjugue par la maîtrise parfaite de sa voix qu’elle soit planante ou agressive. Ce titre est d’ailleurs à mon sens un morceau regroupant un peu tout ce qu’a pu proposer le groupe durant sa carrière.

Un sans faute pour Aphelion donc ? Presque ! Je n’aurais qu’un seul reproche à lui faire, et cela concerne la structure des titres. La majorité d’entre eux suit la même construction, à savoir un départ planant suivi d’une montée en puissance tout au long de l’écoute avant de terminer sur une explosion de guitares, de clavier et de chant bien aigu comme Einar sait si bien le faire. C’est beau, certes, mais Pitfalls nous avait déjà bien matraqué le procédé avec des titres comme Alleviate ou autres Distant Bells. Je trouve dommage d’avoir opté pour ce genre de solution qui est du plus bel effet lorsqu’elle reste exceptionnelle.

Pour conclure, en dépit du défaut soulevé précédemment, Aphelion est vraiment une pure merveille. On y retrouve ce qui faisait le charme de Pitfalls tout en incorporant des éléments des précédentes galettes. Qui plus est, malgré des textes traitant une fois encore de la solitude, des difficultés à sortir de la dépression et autres thèmes récurrents du groupe, j’ai réellement eu l’impression d’écouter une version plus heureuse de Pitfalls, ou du moins emplie d’espoir, de renouveau et encourageant à aller de l’avant. Il semblerait qu’après sa période de tristesse et de désespoir, le groupe, ou peut-être seulement Einar puisque c’est de son vécu dont il s’agissait sur l’album précédent, soit en train de remonter la pente et de sortir des ténèbres. Aphelion est donc l’album qui pourrait faire se réconcilier les réfractaires de Pitfalls avec le groupe, et qui plaira sans l’ombre d’un doute à ses adeptes. Leprous signe à nouveau une très belle réussite, qui prendra de plus en plus de sens au fil des écoutes.

La sortie d’Aphelion est prévue le 27 août sous le label Inside Out Music, et il est bien sûr possible de se le procurer sur le site officiel du groupe ou chez votre fournisseur de disques préféré.

Vous pouvez retrouver toutes nos interviews ici. Pour nos chroniques, ça se passe .

Tracklist :

1. Running Low
2. Out Of Here
3. Silhouette
4. All The Moments
5. Have You Ever?
6. The Silent Revelation
7. The Shadow Side
8. On Hold
9. Castaway Angels
10. Nighttime Disguise

Aphelion

par Leprous

9.5
sur 10

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