Le 16 Octobre au Stereolux de Nantes se produisaient Perturbator, Author and Punisher mais aussi Sang Froid.  Nous avons eu l’occasion de passer un très bon moment en interview avec ces derniers. Que vous soyez amateurs de coldwave ou juste curieux, bienvenue dans l’univers de Sang Froid !

Pozzo Live : Comment est né le projet SANG FROID ?

J.J.S: Le projet est né en 2019 un peu avant le COVID, j’avais envie de faire autre chose que du metal et du black metal. Ça fait longtemps que j’écoute de la coldwave, new wave, électro… Ça me trottait dans la tête depuis un moment déjà. Au fil de la vie et des rencontres, j’ai rencontré B.N. C’était l’occasion de lancer ce genre de projet car il a une véritable culture dans ce type de musique. La rencontre a créé l’occasion. J’ai débuté avec des petites démos et il y a mis un son particulier, ça a commencé comme ça.

B.N: C’était évident que T.C vienne chanter avec nous, on lui a proposé assez rapidement.

T.C: J’ai accepté avec plaisir. C’était sympa pour moi aussi de me mettre en danger sur ce type de chant car je n’en avais jamais chanté. On m’a proposé de rejoindre Sang Froid en décembre 2019.

J.J.S: J’ai proposé rapidement à T.C, assez tôt dans le processus. Pour nous aussi on sortait de notre zone de confort, c’était un petit challenge quoi.

 

Pozzo Live : Est-ce-que la période COVID a aidé un peu à la création du projet ?

J.J.S: Effectivement mais le projet n’est pas né avec le COVID. L’idée existait déjà avant mais cette période a aidé à composer, développer, travailler…

B.N: Du fait du confinement j’ai pu passer énormément de temps à travailler les morceaux, rechercher les sons… On se les envoyait, ça permet de bien se poser.

T.C: A cette période avec Regarde les Hommes Tomber, on avait pas mal de choses de prévues qui n’ont pas pu être faites et ça a permis de libérer du temps pour Sang Froid. C’était un mal pour un bien. Même si on ne se voyait pas physiquement on pouvait bosser chacun à distance sur le projet.

 

Pozzo Live : Comment se passe l’écriture, la composition d’un titre ?

B.N: A la base, c’est JJS qui compose les morceaux casi complets, ce sont des démos sans chant. Il me les envoie et je passe tout à la moulinette. Je bosse le tout en analogique, les boîtes à rythme, les sons de synthé… J’ai quelques synthés vintages des années 80′, ça donne une vraie couleur c’est cool. Après je fais les propositions puis on peaufine ensemble. Quand on est d’accord sur les grosses bases de son et la structure, T.C pose le chant. Depuis que Y nous a rejoint, les morceaux prennent une nouvelle tournure live, plus rock. En réécoutant et à force de répéter, de jouer en live, ils ont évolués avec les touches de tout le monde, ça donne une âme.

 

Pozzo Live : Qui s’occupe des paroles ?

T.C : J’écris et je fais les placements. C’est très différent par rapport à Regarde les Hommes Tomber car j’y suis interprète et là je m’occupe de tout le chant. Je fais une proposition aux gars et après on bosse ensemble.

B.N : On se donne nos idées, c’est vraiment ce travail de groupe qui est super intéressant.

T.C : L’idée, c’est d’avoir un ensemble ajusté qui sert vraiment le morceau.

 

Pozzo Live : As-tu eu un travail particulier à faire sur le chant ?

T.C : Pendant le confinement, j’ai beaucoup travaillé sur mon temps libre. Je bossais seul dans ma cave à partir des démos que m’envoyait JJS. Deux heures par jour à faire les placements et la justesse. Le chant clair est assez nouveau pour moi, je n’en ai jamais fait. C’est chouette, ça permet de se tester sur ce terrain-là, de faire le point. Ce style tolère une certaine marge de manœuvre concernant la justesse. On est davantage sur l’intention que la perfection. Il faut être juste, évidemment, mais l’intention est plus importante. En live, on bosse en air monitor et ça m’aide énormément à préciser les notes.

 

Pozzo Live : Comment s’est déroulée ton arrivé ? (question pour Y)

Y : J’ai été confronté à leur musique quand ils ont sorti l’EP en 2021. J’ai accroché direct bien que j’ai une connaissance en coldwave / new wave plus que limitée. J’ai directement adoré ce que j’ai entendu donc je me suis proposé, comme on se connaît bien avec Regarde les Hommes Tomber, si jamais ils recherchaient un bassiste pour du live. C’est ce qu’il s’est passé en 2022 quand ils ont voulu commencer à faire du live. Je suis uniquement interprète, il y a juste une chanson où j’ai du ajouter une ligne de basse inexistante.

B.N : Les lignes de basses sont vraiment cool et sont jouées par une guitare basse. Quand je les balançais avec une machine, il manquait vraiment quelque chose.

 

Pozzo Live : Vous pensez travailler en studio ?

J.J.S : Je pense que ça devrait arriver en 2023. Pour le moment, on se concentre surtout sur le live. On a commencé les repets à trois mais il manque une présence dans le bas.

J.J.S : Ça fait maintenant six mois qu’on bosse le live et l’apport de la basse est hyper important.

T.C : On peut vraiment avoir un son organique, humain.

 

Pozzo Live : Quelles sont vos influences ?

J.J.S : Mes plus grosses sont Sisters of Mercy et Depeche Mode.

B.N : En électro j’ai énormément écouté la vague indus des années 80’/90′. Skinny Puppy, Nine Inch Nails, Ministry. Même si j’essaie de me détacher de tout ça, j’ai beaucoup de plaisir à réécouter Depeche Mode, Sisters of Mercy…

J.J.S : Par rapport au son de guitare j’ai adoré les albums de Drab Majesty, ça m’a pas mal inspiré. On bosse de nouveaux morceaux en ce moment en essayant d’avoir une orientation plus électro/indus avec des synthés davantage mis en avant. On va plus être influencés par Nine Inch Nails dans ces cas là ou même Depeche Mode à une certaine période. C’est une évolution qu’on essaie de prendre dans cet équilibre guitare/synthé.

T.C : On ne veut pas faire du worship d’une époque en particulier. Bien évidemment, nous sommes influencés par les années 80 mais on adore aussi les musiques gothiques jusqu’à récemment avec She Past Away par exemple, et les années 90′ aussi. Le but n’est pas de faire une synthèse absolue mais d’aller piocher dans ces mouvements là et surtout de le faire à notre sauce.

 

Pozzo Live : Y a-t-il une raison pour cette identité nantaise plutôt affirmée ?

B.N : Par rapport au confinement, ce qu’on voyait quand on sortait de chez nous était très totémique (la tour de Bretagne, la grue, la statue Louis XVI…) On a commencé à taper un délire là-dessus, sur ces totems avec personne autour. Visuellement, on a bien aimé l’esthétisme de tout ça. Il y a un côté « décadence d’architecture » avec la tour de Bretagne vide maintenant, dans le même délire des années 80′ et de ces bâtiments immenses qui ne servent à rien. Les grues qui ne marchent plus tout comme le port, la statue de Louis XVI, une à qui l’on a pas coupé la tête car il la ramène de haut (rires). (ndlr : Cette statue de Louis XVI à Nantes sur la place Marechal Foch est positionnée sur une colonne de 28 mètres de haut.)

(Statue Louis XVI à Nantes)

(Une des deux Grues Titan de Nantes)

(Tour de Bretagne de Nantes)

J.J.S : On s’inspire pas mal du côté très urbain, blockhaus de la coldwave. Si on regarde les groupes d’Europe de l’Est, ils sont particulièrement axés sur ce sujet avec les blockhaus, les vieux bâtiments soviétiques… Nous essayons aussi de le faire avec Nantes, c’est notre manière de rendre hommage.

T.C : Nous ne sommes pas obligés d’aller très loin pour avoir quelque chose d’un peu exotique suivant le regard que l’on porte dessus. L’idée était d’avoir quelque chose de local.

B.N : A l’inverse du black metal qui tend vers quelque chose de plus ésotérique, nous essayons de revenir vers du concret, du matériel, du quotidien.

 

Pozzo Live : Les thèmes abordés sont dans cette même optique ?

T.C : Ouais, c’est essentiellement basé sur cette idée du vécu à travers un prisme très sombre. C’est un genre musical qui se prête bien à ça. L’idée, c’est une catharsis par rapport à beaucoup de choses. Ce sont des sujets assez personnels, souvent reliés à l’enfance et à des thématiques assez crades.

 

Pozzo Live : Votre public habituel vous suit-il aussi sur Sang Froid ?

B.N : Plutôt oui car la notoriété de Regarde les Hommes Tomber au travers des réseaux sociaux a bien aidé et le public metal est très ouvert. Pertubator est un super exemple, c’est de l’électro avec un gros public de metalleux, mais pas que. Il y a 20 ans ça ne se serait pas trop vu.

J.J.S : On a déjà joué avec Perturbator à Poitiers. Le public était mixte, assez jeune et l’accueil plutôt bon. On ramène aussi un public gothique qui ne vient pas forcement aux concerts de metal. Ce public, qui va peut-être aller à des soirées plus intimes, accueille aussi très bien notre musique. De ce que l’on voit par nos expériences scéniques c’est assez rassembleur.

T.C : Il y a un tel éclatement des styles depuis 20 ans, depuis internet, que les gens sont beaucoup moins cloisonnés musicalement parlant. Ils sont assez curieux maintenant, sans toutes ces barrières.

Y : Plus besoin de se cacher pour écouter de la coldwave.

J.J.S : On peut dire en plein public qu’on aime A-HA et Duran Duran sans remords. (rires)

 

Pozzo Live : Pourriez-vous décrire Sang Froid en quelques mots ?

  • Expérimentations
  • Créativité
  • Risques
  • Plaisir
  • Émancipation

J.J.S : Il y a une grosse notion de plaisir et de liberté car Sang Froid a vraiment pour volonté de sortir du milieu plus fermé et étriqué du black metal. On avait envie d’un style musical plus libre, différent sans se donner vraiment de limites dans la composition. On se fait vraiment plaisir avec ce projet. Même si la coldwave a aussi ses codes, la part de prise de risque et de liberté est mieux tolérée dans la coldwave/new wave. Tu as le droit de te perdre par moment.

B.N : Par exemple si on regarde Dead Can Dance, ils ont eu des périodes complément différentes.

 

Pozzo Live : Quel groupe vous a fait aimer la coldwave ?

J.J.S : Il y a toujours une porte d’entrée dans laquelle tu t’immisces. Pour ma part, il s’agit plutôt des groupes récents comme Molchat Doma ou Drab Majesty. Après, tu rentres dans tout un univers…

B.N : Pour moi c’est plutôt de vielles influences comme Sisters of Mercy, des groupes que j’écoutais il y a bien longtemps.

Y : Je suis encore en pleine découverte !

 

Pozzo Live : La toute dernière découverte musicale que vous aimeriez nous partager ?

B.N : Ritual Howls ! J’ai découvert ça il n’y a pas longtemps.

J.J.S : De récent, j’ai bien aimé Whispering Sons et Soft Kill, un groupe que m’ont fait découvrir les gars de Hangman’s Chair. J’en profite car j’aime beaucoup l’évolution d’Hangman’s Chair avec un côté plus new wave. Même s’ils n’ont pas les synthés ça s’en rapproche rien qu’avec les sons de guitare. Leur nouvel album est vraiment dans cette lignée.

T.C : Pour moi, c’est un album de Dernière Volonté que j’ai découvert récemment et que j’écoute en boucle depuis des mois. L’album est sorti en 2006 et ça s’appelle Devant le Miroir.

B.N : C’est une sorte de dark folk avec des synthés bien précis et un chant français aux textes vraiment chouettes, poétiques.

 

Pozzo Live : Vous enchaînez les grosses dates, comment vous sentez-vous à l’approche du concert de ce soir ?

J.J.S : Plutôt confiants. Avec l’expérience de Regarde les Hommes Tomber, nous commençons à être habitués aux grandes scènes. Il y a eu également le Motocultor avec Sang Froid ce qui était déjà une bonne scène. On a bossé avec une metteuse en scène il y a deux jours pour travailler le positionnement, la posture, le corps… C’était hyper intéressant et on a hâte de mettre ça en pratique ce soir. A force de travailler le live, on se sent de plus en plus à l’aise.

T.C : Il y a toujours le petit stress avant chaque concert qui est aussi indispensable. Si on avait pas ça, on serait blasés et il n’y aurait plus d’intérêt.

B.N : C’est vrai qu’on a tendance à se concentrer sur le son, nos instruments sur scène, les lumières… Elle a mis au point un tas d’autres choses qui sont aussi très importantes. Ça impacte vraiment sur ta musique, ta façon de jouer.

T.C : L’idée n’est pas de chorégraphier ce que l’on fait, surtout pas, mais de faire vibrer notre musique de telle manière à ce que le public puisse la ressentir dix fois plus.

B.N : On met l’accent sur la cohérence entre nous tous.

 

Pozzo Live : Des actualités à nous partager ?

J.J.S : Surtout nos prochaines dates qui ont été annoncées dont une avec Frustration le 27 Janvier 2023 à Lille, nous sommes très contents de jouer avec eux. Nous avons également une date avec Cabaret Fantôme le 10 décembre 2022 à Concarneau. A part ça, on continue de composer et espère aller en studio pour le premier semestre 2023. Comme l’activité de Regarde les Hommes Tomber va se calmer, nous allons en profiter pour travailler davantage sur Sang Froid.

 

Pozzo Live : Qui est ce qu’on interview après vous ?

J.J.S :Notre ingénieur son (qui venait de nous rejoindre dans la pièce) ! Pour de vrai, il a un groupe que j’adore qui s’appelle Middle Child et je pense que ça pourrait être hyper intéressant ! C’est à écouter, la chanteuse a une voix magnifique et les idées de compos sont géniales. C’est hyper bien, on adore !

Merci beaucoup aux membres de Sang Froid pour cette interview pleine de bonne humeur, nous vous souhaitons de très belles dates à venir !

Pour le Live Report de Sang Froid, Author and Punisher et Perturbator au Stereolux, c’est par ici !

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Live Report/Interview : ViolentNuggets

Photos de couverture : Newsålem

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